Gilles Kraemer
Déplacement et séjour personnel à Rome
I Farnese e i Carracci nella Roma del Cinquecento. Les Carrache et la Galerie Farnèse. Dans la famille Carrache, je demande Annibale Carracci (Bologne, 1560 - Rome, 1609), son frère Agostino (Bologne, 1557 – Parme 1602).
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Agostino Carracci. Autoportrait présumé. Prêt de Sa Majesté le Roi Charles III, Royal Collection © Royal Collection Enterprises Limited 2025 | Royal Collection Trust.
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Annibale Carracci. Étude de main gauche repliée, peut être celle d’Annibale. Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques © Musée GrandPalaisRmn / Suzanne Nagy.
Au cœur du fastueux Palais Farnèse, siège de l’Ambassade de France à Rome depuis 1874 et de l’École française de Rome depuis 1875, existe un décor réalisé entre 1597 et 1608, passant depuis son achèvement pour être l’un des grands chefs-d’œuvre de la peinture, le modèle de nombreux décors à travers l’Europe durant presque trois cents ans : la Galleria, la Galerie peinte par Annibale, son frère Agostino, son fils Antonio et ses élèves Domenichino (1581-1641), Giovanni Lanfranco (1582-1647) et Sisto Badalocchio (1585-1647).
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Annibale Carracci. Autoportrait présumé. Prêt de Sa Majesté le Roi Charles III, Royal Collection © Royal Collection Enterprises Limited 2025 | Royal Collection Trust.
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Annibale Carracci. Étude pour l’ignudo à droite du médaillon d’« Apollon et Marsyas », ca 1597-1602. Pierre noire et rehauts de blanc sur papier bleu. Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques © Musée du Louvre, dist. GrandPalaisRmn / Suzanne Nagy.
Merveille pour tout « connoisseur » de la fin du Cinquecento et des premières lueurs du Seicento, de la « belle feuille », jamais auparavant, pour aucun autre décor, l'on n'avait conservé autant de dessins, du croquis esquissant les toutes premières idées au grand carton où le dessin est mis à l'échelle de la fresque. Le musée du Louvre – héritier des collections royales françaises – en conserve la première collection au monde, avec les Collections royales britanniques, dont 25 œuvres sont prêtées exceptionnellement par Sa Majesté le roi Charles III. (1).
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Annibale Carracci, Cartone per il Trionfo di Bacco e Arianna, 1598 ca.. Disegno a carboncino e biacca su carta grigio-azzurra © per gentile concessione Urbino, Galleria Nazionale delle Marche.
https://artresearchsite.wordpress.com/2017/03/19/il-trionfo-di-bacco-e-arianna/
La Galleria Nazionale delle Marche à Urbino a prêté l’immense carton d’Annibale (345 x 332 cm.) Corteo di Bacco con Sileno, partie droite du Trionfo di Bacco e Arianna, fresque centrale de la voûte.
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Plafond de la Galerie Farnèse, Rome, palais Farnèse © per gentile concessione del Ministero della cultura, Soprintendenza Speciale Archeologia Belle Arti e Paesaggio di Roma.
L’exposition parisienne raconte la merveilleuse histoire d’une fascination européenne, en présentant pour la première fois, les derniers vestiges tout juste restaurés d’une réplique de la Galerie Farnèse, voulue par Louis XIV au palais des Tuileries, la Galerie des Ambassadeurs (ca 1666-1671) aujourd’hui disparue dans l'incendie de ce palais en 1871.
Un ensemble exceptionnel de très grands cartons, dessinés par les pensionnaires de l’Académie de France à Rome, démontre l’admiration entourant la Galerie Farnèse. L’exposition permet de mieux percevoir la personnalité de son maître d’œuvre principal : Annibale. La scénographie de l’exposition recrée de façon immersive, en plus de la voûte de la Galerie, le plafond du Camerino, à l’étage noble, à la destination ignorée (chambre d’Odoardo Farnese ?), petite pièce considérée comme un espace probatoire pour Annibale auquel Odoardo Farnese confia sa décoration entre 1595 et 1597.
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© photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, I Farnese nella Roma del Cinquecento. Origini e fortuna di una collezione, printemps 2025.
Cette exposition entre en complément, pour ceux qui l’auront vue, avec l’exposition romaine aux Musei Capitolini : I Farnese nella Roma del Cinquecento. Origini e fortuna di una collezione. Présentation incroyable comme les Italiens y excellent, consacrée à l’une des plus extraordinaires expressions du collectionnisme à la Renaissance, l’immense patrimoine artistique des Farnèse (11 février au 8 juin 2025). Hors Italie, la seule recension est celle d'Étienne Dumont ne cessant de se rendre dans ce pays.
https://www.bilan.ch/story/ed-farnese-898775390346
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Domenico Zampieri detto Domenichino, Ritratto del cardinale Odoardo Farnese con Trastevere e il Gianicolo sullo fondo, ca 1602-1603 // Anonimo, Ritratto del cardinale Ranuccio Farnese, ca 1550-1555 // Piero di Giovanni Bonaccorsi detto Perin del Vaga (attri.), Ritratto del cardinale Alessandro Farnese, ca 1546-1547 // Raffaello Sanzio, Ritratto del cardinale Alessandro Farnese, poi papa Paolo III, ca 1511 © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, I Farnese nella Roma del Cinquecento. Origini e fortuna di una collezione, printemps 2025.
Sous le commissariat de Claudio Parisi Presicce et de Chiara Rabbi Bernard, cette exposition – dont je n’ai pu me procurer le catalogue lors de mon déplacement à titre personnel à Rome en mars pour la conférence de presse et la présentation de Caravaggio 2025, celui-ci n’étant pas encore publié un mois après l’ouverture et le service de presse ne disposait pas du PDF – présentait 140 chefs-d’œuvre, revisitant la Collection Farnèse au temps de sa splendeur, du XVI au début du XVIIe siècle.
Naturellement de très nombreuses œuvres venaient de Naples : Museo Archeologico Nazionale, Museo e Real Bosco di Capodimonte et Biblioteca Nazionale Vittorio Emanuele, ayant appartenu à la Collection Farnèse puis à celle de Carlo di Borbone, fils d’Elisabetta Farnese, dernière héritière de la famille.
Commencée par Alessandro Farnese (1468-1549), futur Paolo III (pontificat 1534-1549), poursuivie par ses neveux, les cardinaux Alessandro et Odoardo, la Collection Farnèse fut une des plus célèbres, artistiquement et archéologiquement, recueillant de nombreux chefs-d’œuvre de l’antiquité.
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Annibale Carracci ?, Vestibolo d’ingresso di Palazzo Farnese e l’Ercole Farnese. Gessetto nero. 338 x 203 mm. Frakfurt, Städel Museum. © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, I Farnese nella Roma del Cinquecento. Origini e fortuna di una collezione, printemps 2025.
Dans la première moitié du XVIe siècle, la naissance et le développement de la Collection advint dans une période particulière, la transformation de l’urbanisme de la ville souhaitée par Paolo III, après le terrible Sac de Rome en 1527 et en prévision du Jubilé de 1550. Ce fut son successeur Jules III qui en fit l'ouverture. L’on doit au titulaire du siège de Pierre, l’aménagement de la Piazza del Campidoglio avec l'installation de la statue en bronze de Marc Aurèle à cheval.
Nombreux chefs-d’œuvre de l’antiquité rejoignent le Palais Farnèse, parmi lesquels le gigantesque Ercole, l’impressionnant Toro et la Flora Farnese, retrouvés entre 1545 et 1546 dans les fouilles des Terme di Caracalla et aussitôt transférés dans la cour du Palais. Représentation symbolique et bien visible du pouvoir et du prestige de la famille de ces princes de l’Église. Et noyau de l’émergence de la vocation du Palais, celle muséale.
La Galleria représente l’un des aménagements les plus emblématiques et fastueux du Palais. Sa décoration souhaitée par le cardinal Odoardo fut réalisée entre 1597 et 1608 par Annibale Carracci, avec l’aide de son frère Agostino, de son fils Antonio et de quelques élèves parmi lesquels Domenichino (1581-1641), Giovanni Lanfranco (1582-1647) et Sisto Badalocchio (1585-1647). Agostino arrivé vers la fin de l’année 1598 partira à Parme à la fin de l’année 1600, les rapports tendus avec son frère en étant la cause.
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Salle 5 Galleria Farnese © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, I Farnese nella Roma del Cinquecento. Origini e fortuna di una collezione, printemps 2025.
Peinte entre 1597 et vraisemblablement 1601, de sujets mythologiques inspirés des Métamorphoses d’Ovide, le plafond de cette Galerie est considéré comme l’œuvre la plus importante d’Annibale. Vingt mètres de long, 6,59 de large, haute de 9,8 m, les compositions sont peintes selon la technique de la fresque puis de nombreux « ritocchi / retouches » à sec. La sensualité, l’apparente immoralité des amours des Dieux, suscitèrent à l’époque le scandale pour un tel décor dans le palais d’un cardinal.
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Annibale Carracci, Studio per une figura di Atlante, 1598-1599. Carboncino e gessetto. 472 x 363 mm.. Torino, Biblioteca Reale © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, I Farnese nella Roma del Cinquecento. Origini e fortuna di una collezione, printemps 2025.
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Annibale Carracci, Studio per une figura di Atlante, 1598-1599. Carboncino e gessetto. 365 x 248 mm.. Torino, Biblioteca Reale © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, I Farnese nella Roma del Cinquecento. Origini e fortuna di una collezione, printemps 2025.
Dans le cycle pictural, alternent des scènes, des statues paraissant de marbre, des médaillons imitant le bronze, des nus et des amours. Dans ces compositions se retrouvent des influences de la sculpture antique, raphaélesque et michelangelesque avec des apports de l’école lombardo-émilienne. Au centre de la voûte le Trionfo di Bacco e Arianna, point culminant de la Galleria. Facilitant l’observation de ce magnifique ensemble peint, un miroir mobile permettait son observation.
Quelle pouvait être l’interprétation de cette décoration ? Selon la lecture de Giovanni Pietro Bellori dans ses Vite (1672), la composition célébrait l’union de l’Amore Sacro et de l’Amor Profano. Si l’on ne connaît pas exactement la fonction de la Galleria, l’on peut supposer qu’elle était un lieu dédié à la musique. L’inventaire Farnèse de 1644 y mentionne la présence d'instruments : un clavecin, un orgue.
Les murs seront peints à partir de 1603 en majorité par les élèves sur des cartons d’Annibale : Domenichino, Giovanni Lanfranco (1582-1647) et Sisto Badalocchio.
Placées dans les niches sur les deux côtés les plus longs, six et quatre, des sculptures rares et de prix. Tour de force de cette restitution, l’exposition romaine présentait cinq des dix marbres qui s’y trouvaient, conservés au Museo Archeologico Nazionale de Naples : Dioniso (1er siècle), Satiro con Bacco bambino (2ème moitié du 2ème siècle), Ganimeda con aquila (2ème siècle), le portrait supposé d’Antonia (1er siècle) et Eros Farnese (2ème siècle). Ainsi que des dessins d’Annibale Carracci, détails des fresques de la voûte à côté d’une immense reproduction de celle-ci.
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Le plafond du Camerino © photo Ambassade de France à Rome. https://it.ambafrance.org/Camerino-d-Hercule
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Annibale Carracci, Anfinomo che trasporta il padre, ca. 1595. Pietra nera e lumeggiature in bianco. 315 x 133 mm.. Montpellier, musée Atger – université de Montpellier © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, I Farnese nella Roma del Cinquecento. Origini e fortuna di una collezione, printemps 2025.
La décoration du Camerino, petite pièce à la destination inconnue fut décidé par Odoardo Farnese (1573-1626), neveu d’Alessandro il Giovane, detto il Gran Cardinale (1520-1589), ce dernier neveu Alessandro Farnese (1468-1549). Première œuvre réalisée par Annibale Carracci entre 1595 et 1597 pour le Palais.
L’idée iconographique est due à Fulvio Orsini, comme en témoignent quelques lettres échangées entre ce bibliothécaire, érudit humaniste, chargé des collections Farnèse et Odoardo Farnese. La décoration de cette pièce entend célébrer et exalter les Vertus du représentant de la Maison Farnèse, Odoardo. Elle se compose de six figures allégoriques inscrites en ovales, chacune accompagnée des mythes d’Hercule, d'Ulysse, de Persée qui complètent leur signification morale. Quatre Vertus y sont également représentées, en monochrome dans la décoration en faux stuc, accompagnées de figures de satyres, faunes et putti et de l’emblème conçu par Fulvio Orsini pour Odoardo Farnese, constitué de trois lys rouges pourpres liés par un ruban avec l’inscription en grec « Je me lève vers Dieu ».
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Annibale Carracci, Ercole al bivio. Museo e Real Bosco di Capodimonte © DR
Au centre du plafond se trouvait le très beau tableau d’Ercole al bivio d’Annibale Carracci, aujourd’hui au Musée de Capodimonte à Naples et remplacé par une copie, figure mythique du jeune Hercule poussé à choisir entre le Vice des plaisirs terrestres et la Vertu au parcours difficile pour parvenir à la gloire. L’exposition romaine présentait des œuvres de la Collection Farnese rappelant le cadre sophistiqué du Camerino : quelques importants dessins préparatoires pour les fresques et un pour la peinture Hercule au carrefour ainsi que des gemmes et le précieux manuscrit du XIVe siècle, miniaturiste anonyme, contenant deux œuvres du sénateur et philosophe romain Severino Boezio : De Arithmetica et De Musica.
(1) La Royal Collection est consultable sur le site www.rct.uk
796 résultats sur la base des dessins du Louvre renvoyant à Annibale Carracci et 11 peintures référencées au Louvre // 273 résultats sur la base des dessins du Louvre renvoyant à Agostino Carracci et une peinture référencée au Louvre.
https://collections.louvre.fr/recherche?q=annibale%20carrache%20&author%5B0%5D=447
https://collections.louvre.fr/recherche?q=agostino%20carrache%20&author%5B0%5D=446
Dessins des Carrache. La fabrique de la galerie Farnèse
5 novembre 2025 - 2 février 2026
Le Louvre - mezzanine Napoléon
commissariat Victor Hundsbuckler, conservateur au département des Arts graphiques, musée du Louvre.
Catalogue. Ouvrage de référence publiant et commentant l’intégralité du corpus de dessins préparatoires pour la Galerie Farnèse et le Camerino.
L’accès à la Galerie Farnèse à Rome est possible uniquement lors des visites guidées en français, italien ou anglais // L’ingresso a Palazzo Farnese a Roma è possibile solo con visita guidata in italiano, francese e inglese. https://visite-palazzofarnese.it/prodotto/visita-guidata-palazzo-farnese-guida-francese-2/
I Farnese nella Roma del Cinquecento. Origine e fortuna di una collezione
11 février – 18 mai 2025, prolongée au 8 juin 2025.
Villa Caffarelli, Musei Capitolini, Roma
Commissariat de Claudio Parisi Presicce & Chiara Rabbi Bernard