La fondation GGL scelle la parfaite union de l'ancien et du moderne - Montpellier
Marie-Christine Sentenac
Hôtel Richier de Belleval © Fondation GGL, Montpellier.
A l'hôtel Richier de Belleval, la fondation GGL scelle la parfaite union de l'ancien et du moderne.
Inscrit en 2015 au titre des monuments historiques, joyau d’architecture du XVIIe siècle qui surplombe la ville sur l’une des plus anciennes places de Montpellier, l'hôtel Richier de Belleval a été restauré par l’Atelier Philippe Prost après avoir été acquis par le groupe GGL, en 2017.
Cette Fondation d’entreprise intègre dans ses projets immobiliers résidentiels, publics ou privés, des œuvres d’artistes contemporains conçues pour les lieux. Numa Hamburtin, l’actuel directeur général du MO.CO [Montpellier Contemporain], en a initié le projet artistique « comment faire un palais à notre époque? En mettant dans ce lieu le plus beau de l’art contemporain, pour qu’il soit dans la continuité de ce qui a été fait par le passé, qu’il devienne patrimoine. …Il faut…qu’on ait le souffle coupé en pénétrant dans Richer de Belleval. »
Dans ce Relais & Châteaux de 20 chambres et suites doté un restaurant gastronomique Le Jardin des Sens des étoilés frères Pourcel, les fresques et décors anciens rajeunis par l’Atelier Rico voisinent avec les œuvres pérennes et les créations temporaires telles, en ce moment, celles de Marlène Mocquet (1979) invitée jusqu'au 27 avril 2024 pour Différent parfois, Libre toujours. (1)
Marlène Mocquet et Haut comme trois pommes, 2021. Grès émaillé, lustre or et platine, diamant. 2021 © Marie-Christine Sentenac, Montpellier, 2024.
Marlène Mocquet, Longue-vue. 2020. Pour le plafond : céramique, peinture, colle et émail sur bois de peuplier doré à la feuille de laiton oxydée. Pour les groupes sculptés des corniches : céramique, bronze, émail yeux de verre et chaîne de laiton © Marie-Christine Sentenac, Montpellier, 2024.
Sa Longue-vue que l’on observe avec des jumelles en nacre dans l’escalier d’honneur depuis l’ouverture du lieu le 26 juin 2021, peintures et sculptures en céramique évoquant la région, hérons, colombes, écureuils échappés d’une corne d’abondance ; au zénith, ciel pailleté, oiseaux, couronne de fruits, minuscules flamands roses, forêt d’arbres merveilleux empruntés à l’herbier de Richer de Belleval.
Entre 1128 et 1129 Guilhem VI seigneur de Montpellier fait construire un palais sur une colline, vue imprenable et situation dominante sur la ville. Il sera doté d’une chapelle pour abriter un fragment de la Sainte Croix rapporté des croisades par Guilhem VII. Le chapitre des Chanoines (canorga en occitan) de la cathédrale de Maguelone s’y installe ensuite et donne son nom à cette jolie place. De guerres de religion en démolitions et reconstructions (le quartier est détruit à partir de 1626), La Canourgue devient l’une des plus grandes places de la ville en 1666. «The place to be» pour les notables.
En 1676, Charles de Boulhaco, conseiller à la cour des comptes et finances de Montpellier, y fait bâtir son hôtel particulier l’Hôtel de Boulhaco, puis le cède à son gendre Georges Richer de Belleval, petit neveu du célèbre Pierre Richer de Belleval, médecin d’Henri IV et de Louis XIII, célèbre botaniste, fondateur du Jardin des Plantes de Montpellier à la demande du roi Henri IV. Les propriétaires successifs de la demeure, dont la façade est construite dans l’alignement exact de la place, du Moyen-Age au XIXe, aménagent l’espace, véritable mille-feuille historique, qui sera racheté en 1816 par la municipalité.
Dès lors Hôtel de Ville jusqu’en 1975, puis annexe du Palais de Justice jusqu’en 2010.
Jim Dine, Faire danser le plafond, 2019. Carreaux de grès © Marie-Christine Sentenac, Montpellier, 2024.
Les colonnes néo-classiques du seuil à peine franchies, l’arc en ciel des 105 cœurs de Jim Dine (1935) se déploie en une mosaïque de plus de 30 m² de panneaux de grès installés au plafond, 105 cœurs emblématiques de son travail, multicolores, conçus avec la Manufacture de Sèvres selon l’ancienne technique des émaux, cuits à 1050 degrés pendant 12 heures dans ses fours…pour durer des siècles ! (2)
La Manufacture a créé 7 nouvelles couleurs (qui s’ajoutent à son catalogue de 1200 teintes) pour Faire danser le plafond, œuvre qui a demandé plus de 3 années de préparation et a été inaugurée avec la fondation en même temps que son exposition temporaire du 24 juin au 24 décembre 2021
Takashi Kawamata © Marie-Christine Sentenac, Montpellier, 2024.
Sur le côté, on peut voir sur la photo un Nest de Takashi Kawamata (1953), vestige de l’exposition temporaire Tree huts in Montpellier, qui lui a été consacrée du 22 juin au 10 décembre 2022. Il avait conçu ce projet pour le site allant jusqu’à installer des Tree huts ou Cabanes perchées dans les arbres de la place de la Canourgue.
Abdelkader Benchamma, Prima Materia. Fresque à l’encre de Chine © Marie-Christine Sentenac, Montpellier, 2024.
L’accueil de l’hôtel et du restaurant a été confié à Abdelkader Benchama (1975). Sa fresque à l’encre sur le plafond d’une salle voûtée, Prima Materia, fait référence à la matière du chaos, première substance utilisée par les alchimistes dans la quête de la pierre philosophale. Elle contient les 4 éléments, l’eau bleue, la terre brune, le feu rouge et l’air blanc. Recherche d’éternité correspondant sans doute aux souhaits du créateur qui désire laisser une trace. Arnaud de Villeneuve (ca 1240 ou 1258 - 1311 ou 1313) grand médecin était connu dans la cité pour pratiquer l’alchimie, discipline ancestrale qui était alors explorée au même titre que la médecine par les scientifiques.
Jean Fabre, Hommage à un esprit libre, 2020. Elytres de scarabées bijou sur dibond et aluminium © Marie-Christine Sentenac, Montpellier, 2024.
Les milliers d’élytres de scarabées de Jean Fabre (1958) ornent le plafond du bar cosy à l’amusant trompe-l’œil, autrefois Salle des Mariages de l’hôtel de ville. Dans le lanternon Hommage à un esprit libre, s’inspire des planches de botanique de Pierre Richer de Belleval. Symbole de renaissance, la figure centrale du double phénix qui tient dans ses serres un serpent symbole d’éternité, allusion au passé tragique de la ville assiégée, détruite par les guerres de religion et la peste, mais toujours debout. Sur les angles du lanternon, quatre panneaux inspirés par l’héraldique mêlent gravures botaniques, figures de serpents et motifs symboliques : armoiries des Guilhem, caducée de la médecine, anneau du mariage, balance de la justice faisant écho à l’histoire de l’hôtel.
Olympe Racana-Weiler, Le Chant de la Sybille. Murs et plafond peints © Marie-Christine Sentenac, Montpellier, 2024.
Carte blanche a été donnée à Olympe Racana-Weiler (1990) illustrant Le Chant de la Sybille, dans le boudoir du premier étage de l’hôtel Richer de Belleval,
Pendant un mois entier, avec une inépuisable énergie et l’absence de crainte de la démesure qui la caractérisent, elle transforme les murs et plafonds du boudoir qui mène aux chambres en grotte peinte où sont enfouis les secrets de ces lieux. Concert de couleurs, immersion dans la peinture. La jeune femme a bénéficié d’une exposition temporaire Journal - 10 mars - 9 septembre 2023 -, occasion de présenter un dessin sur bois et des gravures, des sérigraphies monotypes, des carborandums, dont elle s’est fait une spécialité – elle a travaillé dans l’atelier parisien du lithographe Michael Woolworth -.
Claude Vialllat revenait dans la cité montpelliéraine après une formidable rétrospective à l’été et automne 2014 au musée Fabre. L’un des membres fondateurs de Support/Surfaces a présenté des travaux récents, objets en corde et bien sûr des tissus peints du motif qui l’a rendu célèbre, sur toutes les sortes d’étoffes qui lui tombent sous la main, Kitchissime -28 janvier - 30 mai 2022-.
Une visite s’impose dans cette fondation magique où l’art contemporain a été pensé en harmonie avec les lieux, trouvant sa place dans les espaces restés vierges ou qui ont perdu leur décor d’origine.
La fondation propose sur inscription des visites guidées (10 personnes maximum) d’une heure ainsi que de nombreux ateliers pour adultes et enfants…art et philosophie, art et méditation… S’inscrire sur le site www.fondation-ggl.com
(1) Exposition Différent Parfois, Libre Toujours, une mise en lumière du talent envoûtant de Marlène Mocquet – 27 octobre 2023 – 22 avril 2024
(2) Jim Dine offre son Cœur au Centre Pompidou - http://www.lecurieuxdesarts.fr/2018/04/jim-dine-offre-son-coeur-au-centre-pompidou.html
Merci à Alba Sagols & et Pascal Scuotto
Fondation d’entreprise GGL, au cœur de l’Hôtel Richer de Belleval, Place de la Canourgue, Montpellier
https://www.hotel-richerdebelleval.com/
Jardin des sens © DR https://www.relaischateaux.com/fr/restaurant/jardin-des-sens/