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Gilles Kraemer (envoyé spécial).   

 

Génération X (depuis 1965) puis Y (depuis 1980) puis Z (depuis 2000) pour les personnes nées dans ces créneaux. Et maintenant "Milléniales", postulat choisi par Vincent Pécoil (ancien galeriste de la galerie Triple V fermée en 2018), présentant " un ensemble représentatif de la création " d’œuvres, exclusivement créées entre 2000 et 2020. Peu importe la date de naissance des quarante-neuf artistes retenus, de toutes générations, de Francis Baudevin (1964) à Kelley Walker (1969), de Sylvie Fanchon (1953) à Nicolas Milhé (1976) ou de Mimosa Echard (1986) à Gérald Petit (1973) ou Bertrand Lavier (1949).

 

Jean-Marie Blanchet (1970) Woods#1, 2014, acrylique sur toile, 250,5 x 220,5 cm., don de l’artiste, collection Frac Nouvelle-Aquitaine & Bertrand Lavier (1949), Lothar, 2000, peinture acrylique sur métal, 203 x 730 x 360 cm., collection du CNAP © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020

Commençons par la dernière salle celle de la section nature morte, ouverte sur la lumière, une des sept sections thématiques dispersées dans les vastes salles blanches, très blanches de la MÉCA bordelaise. La plus intéressante dans ce pertinent dialogue entre trois artistes. Est-ce le signe du destin,car dans la précédente exposition Narcisse ou la floraison des mondes, cette salle m’était apparue également la plus pertinente !

 

Jean-Marie Blanchet (1970) Woods#1, 2014, acrylique sur toile, 250,5 x 220,5 cm., don de l’artiste, collection Frac Nouvelle-Aquitaine © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Gérald Petit (1973), triptyque Sans titre (Moderne), 2000, huile sur toile, 200 x 166 cm. chaque © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020.

Au milieu, git Lothar (2000) de Bertrand Lavier (1949), un morceau de pylône électrique tordu, renversé par la grande tempête du 26 décembre 1999. Appelé Lothar par les météorologistes, cet ouragan dévasta les forêts européennes, comme un signal des Dieux nous prévenant du changement climatique dans ces jours de passage dans un autre millénaire. Recouvert de larges couches de peinture aluminium, cet "empâtement à la Van Gogh" confère à ce ready made le statut muséal d’une sculpture appartenant aux collections du CNAP. Face à cette imbrication de ferrailles, dans une relation de verticales et d’horizontales, Wood #1 (2014) de Jean-Marie Blanchet (1970), acrylique simulant parfaitement des lamelles de bois disposées dans une architecture d’imbrications et de croisements, de superpositions, dans une résurgence des bois frottés de Max Ernst ou de xylographies de graveurs de la Renaissance allemande. Sur l’autre mur, le triptyque Moderne (2000) de Gérald Petit (1973), trois huiles inspirées de photographies d’incendies criminels en Amazonie, trois temps du déroulé d’une même action : l’incendie, la fumée se dissipant, le paysage calciné. Vingt années après l’avertissement Lothar, la destruction voulue par l’homme vire en cauchemars.   

 Nina Children (1961), La Haine de la peinture (esquisse), 2009, huile sur toile, 81 x 60 cm., collection du Frac Artothèque Nouvelle-Aquitaine © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020

Retour sur la première œuvre ouvrant l’exposition, placée seule sur un mur, bien en évidence : La Haine de la peinture (2009) de Nina Children (1961). Un titre provocateur que celui de "peinture", la peinture perçue comme une aberration de tenants d’une modernité sans concession abhorrant la peinture de chevalet et n’acceptant pas ce retour de balancier que l’on voit, enfin, avec la réapparition de la peinture figurative chez des peintres tels Thomas Lévy-Lasnes, Romain Bernini ou Nazanin Pouyandeh, tous les trois dans l’orée de la quarantaine. J’aime cette juxtaposition de visages chez cette artiste, celui de son autoportrait, celui de son modèle, l’acte de création, l’acte de réception. Ceci n’est pas nouveauté si l’on songe à Velázquez et au miroir reflétant les deux monarques qu’il est en train de peindre, comme s’ils avaient pris la place du regardeur de la toile, de ce "work in progress". Nina Children joue avec pertinence de ce rapport représenté/représentant, modèle/artiste, finalement tout ce qui fait la peinture.

 

Ida Tursic & Wilfried Mille (1974), La peinture aux radis, 2020, huile sur panneaux de bois et cadre de chêne, 317 x 619 cm. © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020.

Autre tenant de la peinture, le duo d’artistes Ida Tursic & Wilfried Mille (1974) – largement lancé puisque Grand Prix de peinture de la Fondation Simone et Cino Del Duca 2020, nommé au Prix Marcel Duchamp 2019 - La peinture aux radis (2020) mais aussi au navet, escargots en persillade, rouge à lèvres - encore un titre humour – une immense toile composée de quatre panneaux de bois raboutées, leur pratique, un mixte entre figuration et dilution de la peinture façon aquarelle. (1) 

 

Flora Moscovici (1985), L’herbe de laşi pousse sur les souvenirs (2020), pigments et liant vinylique sur murs et sol, production du Frac Nouvelle-Aquitaine© photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020.

Dilution totale qu’atteint Flora Moscovici (1985) pour son intervention in situ, une projection de pigments sur les murs et le sol L’herbe de laşi pousse sur les souvenirs (2020); la lecture éclairante du cartel nous apprendra que son geste est inspiré d’un cimetière juif en Roumanie, envahi par la végétation. J’y verrai plutôt Rotko dans sa sacralité et Monet (les Nymphéas dès 1890) dans cet espace de la nature. L’étonnement sera plus grand face à un mur, peint façon faux béton par Sylvain Rousseau (1979) ; l’illusion est surprenante ne manque pas de préciser le cartel, sur lequel Sans titre (2003) de Jessica Stockholder (1959), perdu dans l’immensité de Suggestion de présentation #2 (2020), est accroché.

 

Á gauche Jean-Luc Blanc (1965), Fireman, 2020, huile sur toile, 200 x 200 cm. Au milieu Nicolas H. Muller (1986), Picabia sans Aura, 2016, huile sur carton, 116 x 86 cm chaque, collection Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020.

Très amusant de constater que l’iconique Femmes au bull-dog (1941) de Francis Picabia (1879-1953), agitateur dada de la peinture, de l’écrit, de la mise en scène, soit revisité dans le triptyque de Nicolas H. Muller (1986) Picabia sans Aura (2016). Á côté, l’angoissant et hyper-réaliste Fireman énucléé (2020) de Jean-Luc Blanc (1965) dans cette salle dédiée aux gris et aux noirs.

 

Peter Halley, The Choise, 2016, acrylique, acrylique fluorescente et Roll-a-tex sur toile, 183 x 198 cm.  //  Sarah Morris (1967), Pools- Blue Moon (Miami), 2002, laque sur toile, 214 x 214 cm., collection du CNAP  //  Damien Mazières (1975), Sans titre, 2002, huile sur toile, 150 x 200 cm., collection du Frac Nouvelle-Aquitaine  //   Blair Thurman (1961), Ribbons & Bowns, 2019, acrylique sur toile, 239 x 240 cm  //  © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020.

 

Bernard Frize (1954), Oma, 2007, acrylique sur toile, 240 x 310 cm., collection du Centre Pompidou, Paris, Musée national d’art moderne/Centre de création industrielle © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020.

La couleur, vous la trouverez sur le beau mur de la section Paysages avec Peter Halley (1953) The Choise (2016), Pools- Blue Moon ( Miami) (2002) de Sarah Morris (1967), Damien Mazières (1975) immeuble dans la perte d’équilibre de son basculement vers l’arrière Sans titre (2002) et le circuit automobile de Daytona revisité par Blair Thurman (1961) pour Ribbons & Bowns (2019), non loin d’Oma (2007) de Bernard Frize (1954), magnifique prêt du Centre Pompidou sur lequel nous terminerons ce parcours.

 

in situ © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020.

in situ © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2020, exposition Milléniales. Peintures 2000-2020.

(1) www.lecurieuxdesarts.fr/2020/04/les-nommes-du-grand-prix-de-peinture-de-la-fondation-simone-et-cino-del-duca-institut-de-france-ii.html

 

Milléniales. Peintures 2000-2020

25 septembre 2020 - 3 janvier 2021 (à vérifier dans ces temps de pandémie du coronavirus) - Commissariat Vincent Pécoil

En parallèle Désoleil, une exposition d’Anne-Charlotte Finel (1986) - dates identiques - Commissariat Claire Jacquet - L’installation sonore Ressaut (2019, 10’) occupe une place à part dans la production d’Anne-Charlotte Finel puisque nulle vidéo. Cette œuvre immersive - nous sommes plongées dans le noir - autour du mascaret, phénomène de remontée de la marée dans un estuaire - est une composition musicale multidirectionnelle, en collaboration avec le musicien Luc Kheradmand (1985). Filmée de nuit, la vidéo Hors Sol (2019, 10’23’’) explore la silhouette de serres gigantesques servant à la culture intensive de tomates

Frac Nouvelle-Aquitaine MÉCA - Bordeaux - https://fracnouvelleaquitaine-meca.fr/

 

ConfidentiElles et les 20 ans du prix Marcel Duchamp - Collections du musée des Beaux-Arts de Libourne et du FRAC Nouvelle-Aquitaine-MÉCA, du 10 octobre 2020 – 9 janvier 2021 à la Chapelle du Carmel & musée des Beaux-Arts – 33 500 Libourne - 

 

 

 

Tag(s) : #Expositions France
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