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Publié par Gilles Kraemer

Gilles Kraemer (envoyé spécial).

 

Dans l'étonnement de penser plus loin, de penser l'inconnu. Quels étaient les mondes (in)connus au XVe siècle ?

En pays de Léon, dans le Finistère, le château de Kerjean fut édifié à la fin du XVIème siècle, dans l’agitation politique de la Guerre de la Ligue sévissant en Bretagne entre 1588 et 1598. Les douves et l’enceinte fortifiée sont les traces  de la défense de cette demeure qui fut habitée jusqu’en 1909, la famille des Coatgoureden étant la dernière. Aujourd’hui, le département du Finistère en assure la gestion.

Henricus Martellus Germanus, Mappemonde en projection conique sur un modèle ptolémaïque, ca 1490-1492 © DR.

Comme le souligne Anne-Flore Marziou, directrice de ce lieu, cette exposition entre dans le cycle L’élargissement du monde à la Renaissance. Première exploration, celle d’En Terre inconnue ? à laquelle succéderont Les conquêtes européennes puis Regards croisésPour les commissaires Philippe Ifri et Marianne Dilasser, il s’agit d’imaginer le monde tel que les contemporains du XVème le voyaient, en un déplacement dans les quatre parties du monde : l’Europe, l’Asie, l’Afrique et l’Amérique.

Julien Discrit (1978), Carte mémoire – Montréal, 2016. Bois et 24 billes d’inox // carte d’Henricus Martellus © photographie Le curieux des arts Gilles Kraemer, avril 2021.

Initiant cette exposition didactique, émaillée de nombreux dispositifs multimédias, d’objets anciens et d’œuvres contemporaines dans un harmonique rapprochement, des reproductions de cartes anciennes – carte du monde circulaire d’Al- Idrîsî, ca 1154, carte Kangnido, 1470... - invitent aux voyages dans des contrées aux contours indéfinies, à travers le prisme des voyageurs et des navigateurs, comment ils voyaient mais aussi imaginaient le monde autour d’eux, la terra incognita. Un monde cependant connecté par la circulation des marchands et des voyageurs de l’Ancien Monde. La Carte mémoire - Montréal, 2016, de Julien Discrit, travaillant autour de la représentation de l’espace et du temps, s’inspire des cartes d’orientation des navigateurs micronésiens faites de baguettes de bambou pour indiquer les vents ; les points d’acier dans cette monture de bois représentent l’articulation sentimentale des lieux significatifs de la ville québécoise dans la mémoire de l’artiste.

Les récits des intrépides voyageurs, qu’ils soient véridiques ou inventés ou fantasmés, racontent les terres qu’ils ont parcourues ou frôlées ou dont ils entendirent parler. Le film d’animation de Natyelli Mora, Marco Polo et Ibn Battûta, raconteurs du monde, 2020, questionne le monde que ces deux découvreurs arpentèrent.

© photographie Jean-Philippe Rivier – château de Kerjean, 2021. 

L’Europe est représentée comme un monde de la diplomatie, dans des relations de pouvoirs, dans des alliances et des ruptures d’alliances, dans des guerres, celles d’Italie, de l’Espagne contre l’Angleterre, de la France contre le Saint-Empire. Le Prince de Machiavel - à côté du Droit de la guerre et de la paix d’Hugo de Groot, 1663, sur le droit maritime - est présent mais aussi le questionnement de la vérité historique, du fanatisme religieux et de l’utopie  dans l’évocation par Münster, 2016, moyen-métrage de Martin Le Chevalier (1968) sur l’histoire des anabaptistes.

Japon, Katana, ca 1870. Fer, cuivre, bois, fibre et galuchat // Japon, gardes de sabre © photographie Le curieux des arts Gilles Kraemer, avril 2021.

L’Asie apparaît, immense continent où plusieurs civilisations coexistent. Partant de la chute de Constantinople le 15 mai 1453 qui incitera à trouver une autre route en contournant l’Afrique pour l’océan indien, dans un voyage vers la Chine des Ming et le mystérieux Japon. Époque de l’arrivée en Europe des précieuses porcelaines de bleu et de blanc, cet or blanc qui déchaînera les passions des Princes et dont le mystère de la porcelaine dure ne sera percé par les européens qu’au XVIIIème.

 

 

 

 

 

 

 

à gauche, Georges Brisson (1902-1980), Souvenir d’Amazonie, 1924. Huile sur toile. Musée d’Arts de Nantes © photographie Le Curieux des arts Gilles Kraemer, avril 2021.

Ana Marzei, Masque, 2018. Bois peint © photographie Le Curieux des arts Gilles Kraemer, avril 2021. Son travail interroge le syncrétisme des religions afro-brésiliennes mélangeant animisme, christianisme et rites indigènes

L’Afrique, contournée par les Européens, dans leurs déplacements vers la Chine, le Japon et l’Inde des épices, reste le territoire mystérieux dans lequel l’on s’aventure peu, propice aux légendes dont celle de l’utopique pays du prêtre Jean. L'Amérique ne sera révélée qu’en 1492 à l'Europe. Des reproductions des Cortex Mendoza, Borbonicus, Xoloti, Laud, des objets mayas, incas et aztèques sont les évocations de ces territoires, de la cordillère des Andes à l’Amérique centrale.

 

 

 

 

 

Nicolas Floc’h (1970, Rennes), La couleur de l’eau, CO2 02, photographies, 2020 //  Diatomée pennate 110 microns, 2019. Pierre bleue du Hainaut sculptée par fraisage © photographie Le Curieux des arts Gilles Kraemer, avril 2021.

Depuis 2016, le Château de Kerjean, en partenariat avec Passerelle, Centre d’art contemporain à Brest, coproduit une œuvre. Cette année, Nicolas Floc’h présente un ensemble de 17 photographies de la série La couleur de l’eau, Colonne d’eau CO2→02. Océans des navigateurs dans cette exploration des profondeurs, de leurs inconnues, entre art et science. Voyage qu’il poursuit dans la cour du château, y ayant déposé des pierres bleues de Hainaut qu'il a sculptées, des pierres nées de sédimentation d’organismes marins et de planctons. Retour aux sources dans ce lien avec les océans, liens vers les terres inconnues explorées par d'intrépides voyageurs.

Le château de Kerjean © photographie Dominique Dirou – château de Kerjean.

Le château de Kerjean © photographie Digipictoris.

 

En terre inconnue ? Le monde au 15e siècle

27 mars au 31 octobre 2021, ouverture effective le 19 mai, dans le troisième déconfinement progressif

Château de Kerjean - 29440 Saint-Vougay

Tél. 02 98 69 93 69    https://www.cdp29.fr/

Commissariat général : Philippe Ifri, directeur général de Chemins du patrimoine en Finistère & Marianne Dilasser, responsable des expositions de Chemins du patrimoine en Finistère  // Commissariat d’exposition Edith Joseph & Sabrina Bisson

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