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Gilles Kraemer
Déplacement et séjour à titre personnel à Avignon
Première, samedi 8 juillet 2023, 23h


Il est des lieux magiques à Avignon, qui vivent, vibrent dans la portée des mots, des images, des souvenirs. Le cloître des Célestins. Le cloître des Carmes. La Cour d’Honneur, ce qui ne fut pas le cas cette année, Julie Deliquet ayant ignoré le mur qui le lui a bien rendu, lui renvoyant le silence. 

Kono atari no dokoka, Michikazu Matsune et Martine Pisani, 2023 © Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon.
La cour de l’Hôtel de Montfaucon de la Collection Lambert est un autre lieu magique, avec ses deux murs aux immenses plaques de marbre, conçue telle une salle d’exposition à ciel 
ouvert. L’année passée, ici même, ANIMA avec Noémie Goudal photographe plasticienne, Chloé Moglia, performeuse, metteuse en scène Maëlle Poésy nous avait intéressé. (1)

Kono atari no dokoka, Michikazu Matsune et Martine Pisani, 2023 © Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon.

Qu’en serait-il cette année avec Kono atari no dokoka [Quelque part par ici] de Michikazu Matsune et Martine Pisani, une création pour ce festival. Ce soir, la stridulation des grillons précédant le spectacle cessa dès le début de la représentation. A 23h, il était temps que ces insectes arrêtent leur concert amoureux pour écouter et regarder cette pièce censée se dérouler à Kobe. Cette ville où Martine la marseillaise chorégraphe a toujours rêvé d’aller.
Pour elle et avec elle, dans la conjugaison de leurs souvenirs, Michikazu Matsune - danseur, artiste performeur, né à Kobe, qu’une rencontre amoureuse avec Judith – non poursuivie – incita à vivre à Vienne où il travaille aujourd’hui – a créé Quelque part par ici.

Kono atari no dokoka © DR Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Avignon, 08 juillet 2023.

Partage des mémoires. Quand il n’y a plus d’image, comment se souvenir des spectacles, de la chorégraphie, de la danse dans cette reconstruction du parcours de Martine, commencé par le solo A mon gré (1984) pour se clore avec Là où nous sommes (1996) où Theo Kooijman dansa pour la première fois, cette période pendant laquelle Martine dansait ses chorégraphies.
Avant que la sclérose en plaque ne surgisse.
Vingt-sept ans après, elle revient sur scène, assise derrière une table minimaliste, à côté de Michikazu, dans un échange de regards d’une magnifique complicité.

Kono atari no dokoka © DR Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Avignon, 08 juillet 2023.
Evocation de danses la distance, dans un croisement de leurs histoires personnelles, même les plus intimes, auxquelles Theo Kooijman se mêlera. Théo, son compagnon, qu’elle rencontrera au Grand appétit, cuisinier dans ce restaurant macrobiotique, puis ouvreur au Théâtre de la Ville – le temple parisien de la danse contemporain -. Théo qui a dansé un tango avec Pina Bausch.
Martine dont Michikazu raconte la vie, sa naissance à Marseille, une ville portuaire comme Kobé, un point qui unit ces deux danseurs. Son intégration dans le groupe Dunes. Sa rencontre avec Odile Duboc en 1989, sa création de la compagnie du solitaire.  
Théo interprétant des gestes répertoriés par Martine dans ses carnets, tel basilic fané ou la mer.
Construction en direct par Michikazu d’une petite table pour la cérémonie du thé.
Lecture du script d’un solo de 1988.

Dialogues entre les deux chorégraphes dans l’évocation de spectacles passés qu’il faut imaginer, danses, vidéos. Dont celle de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques d’hiver d’Albertville de 1992 chorégraphiée par Philippe Découflé, projetée pixelisée car les droits sont faramineux précise Michikazu. Trente et un an après, 13 000 euros demandés pour trois minutes d’exploitation et de diffusion. C’est bien que cela soit dit..., l’art vivant n’est pas le royaume des bisounours !
Evocation du passage à l’an 2000 dans un bruit de feux d’artifices.

Kono atari no dokoka, Michikazu Matsune et Martine Pisani, 2023 © Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon.
Moment le plus beau, celui où Theo et Michikazu interprètent, allant de jardin vers cours, le tableau de Pablo Picasso : Deux femmes courant sur la plage (1922). Un temps suspendu, quelques secondes, les corps s’envolent. Magnifique.

Applaudissements chaleureux et enthousiastes. La magie était enfin était au rendez-vous, cette nuit.

Kono atari no dokoka © DR Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Avignon, 08 juillet 2023.

Kono atari no dokoka [Quelque part par ici] de Michikazu Matsune et Martine Pisani
Avec Theo Kooijman, Michikazu Matsune, Martine Pisani
Conception Michikazu Matsune en dialogue avec Martine Pisani 
Fondé sur les premières œuvres de Martine Pisani  
Lumière Ludovic Rivière  //  Vidéo Michikazu Matsune, Maximillian Pramatarov
Conseil artistique Miwa Negoro, Ludovic Rivière, Anne Lenglet
Régie vidéo Anne Lenglet  //  Traduction pour le surtitrage Marion Schwartz
Pour 7 représentations, du 8 au 15 juillet 2023, à la Collection Lambert
Place achetée

(1) http://www.lecurieuxdesarts.fr/2022/08/la-performance-au-secours-d-anima-festival-avignon-in-2022-76eme-edition-iii.html
 

Tag(s) : #Avignon, #Théâtre
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