Brèves de la 56ème Exposition internationale d'Art – @ La Biennale di Venezia 2015 - All the World's Futures (VII). Sentiments très contrastés de quelques pavillons nationaux
Au large de San Giorgio Maggiore © Le Curieux des arts Antoine Prodhomme. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 27 octobre 2015
Un retour à Venise, dans cette dernière semaine d'octobre, pour cette 56ème Biennale de l'art, offre de nombreuses surprises, des découvertes, des redécouvertes, un nouveau regard, un regard beaucoup plus serein passée l'euphorie de la première semaine intense de mai, des cinq jours des vernissages entre pavillons nationaux aux Giardini, à l'Arsenale ou en ville, événements collatéraux, expositions ou soirées privées (à condition d'y être conviés). Loin de l'effervescence de mai et parfois d'appréciations trop rapides dans cette saturation d'impressions. Un temps de sérénité. impressions-la-biennale-de-venise-56e-exposition-internationale-d-art
Voici un regard sur quelques-uns des 89 Pavillons nationaux à voir ou pas du tout, laissant songeur ou captivant le public. Sans aucune surprise, ce 9 mai 2015, le prix du Lion d'or pour la meilleure participation nationale fut décerné au Pavillon de l'Arménie. Nul n'en doutait !lion-d-or-pour-la-meilleure-participation-nationale-au-pavillon-de-la-republique-de-l-armenie-56eme-exposition-internationale-d-art
Mais pourquoi pas, en ces temps de réflexions sur le futur de notre planète Terre, le Pavillon du Tuvalu pour Crossing the Tide ne retint-il pas l'attention ?
Voyage - Trokomod. Pavillon de la République d'Indonésie, Arsenale © Le Curieux des arts Gilles Kraemer. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 7 mai & 27 octobre 2015
Le Pavillon de l'Indonésie, tout au bout de l'Arsenale pour Voyage-Trokomod d'Heri Dono dans la correspondance du thème de la Biennale retenu par son directeur artistique Okwui Enwezor : All the World's Futures, dans son interrogation sur les relations entre la globalisation et les cultures locales, d'un point de vue historique, social et politique. Embarquez et pénétrez dans cet étrange animal de métal hydride le Trokomod, dont l'on ne sait s'il est cheval de Troie greffé à un dragon de Komodo ou une canonnière, doté d'un périscope et de longues-vues alors qu'au-dessus de vous volent des nefs pilotées par des vikings dont les ombres se projettent sur les murs.
Wrong Way Time. Pavillon de l'Australie, Giardini © Le Curieux des arts Gilles Kraemer. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 7 mai & 27 octobre 2015
Le nouveau Pavillon de l'Australie, dessiné par le cabinet d'architectes Denton Corker Marshall, comme suspendu, accueille plongé dans le noir Wrong Way Time de Fiona Hall. Un cabinet des merveilles, un Kunstkammer aux Giardini, mêlant des pendules à coucou et des horloges, des animaux faits de coton et de rafia, des cranes, des masques, des tissus, des billets de banque, des bois flottés aux formes anthropomorphes.
Codice Italia. Pavillon de l'Italie, Arsenale © Le Curieux des arts Antoine Prodhomme. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 7 mai & 27 octobre 2015
Enfin ! Après les errements de 2011 et la déception de 2013, le Pavillon de l'Italie à l'Arsenale avec Codice Italia offre des propositions vraiment variées et compréhenibles. Artistes consacrés diront les esprits chagrins. Pourquoi pas, lorsque l'on trouve... enfin un intérêt à un pavillon accueillant l'homme solitaire de Mimmo Paladino, le naufrage du bateau revu par Claudio Parmiggiani, Nicola Samorì revisitant les icônes picturales de la Renaissance et du Baroque, la sculpture informelle d'Alis/Filliol (Andrea Respino & Davide Gennariono) ou la rigueur d'une archive de la mémoire selon Jannis Kounellis. Tous différents dans leur démarche avec ces œuvres inédites créées pour la Biennale.
Rapture. Pavillon de la Norvège, Giardini © Le Curieux des arts Antoine Prodhomme. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 7 mai & 27 octobre 2015
Sonorité d'un harmonica de verre et grandes vitres brisées vous accueillent, aux Giardini, dans le Pavillon des pays nordiques occupé cette année par la Norvège avec Rapture de Camille Norment. Minimalisme au maximum dans ce pavillon présentant toujours, pour les biennales qu'elles soient d'art ou d'architecture, des œuvres d'une rigueur absolue. Harmonie et dissonance, lumière vénitienne, verres brisées, son prégnant, tout concourt à une belle et forte œuvre. Coup de cœur, en le revoyant une nouvelle fois. Et un des coups de cœur du public en observant et écoutant les visiteurs de cet espace. Ce pavillon aurait pu recevoir largement une mention spéciale. Cette année ce fut pour le Pavillon voisin des États-Unis avec They Come to US Without a Word de Joan Jonas ; enfin une belle participation après celles des années 2009, 2011 et 2013 inintéressantes ou totalement incompréhensibles.
The Ways of Folding Space & Flying. Pavillon de la Corée, Giardini © Le Curieux des arts Gilles Kraemer. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 7 mai & 27 octobre 2015
Passionnément pour le Pavillon de la Corée avec The Ways of Folding Space & Flying avec les vidéos de Moon Kyungwon & Jeon Joonho projetées à l'intérieur et sur les parois vitrées de ce pavillon, à quelques mètres de celui du Japon, très poétique, avec The Key in the Hand de Chiharu Shiota. Un pays à considérer de plus en plus car d'années en années, d'une Biennale d'architecture à une Biennale d'art, les créateurs invités déclinent des œuvres d'une grande qualité dans un discours compréhensible de tous et non exclusivement relevant de "curateurs" ou de "sachants". Une belle vision du futur, en une douce rêverie, un voyage dans la réduction de l'espace et du temps, un dépassement des barrières physiques. Là aussi, accueil très fort du public, silencieux, assis ou couché, happé par toutes ces images offertes. Quand se décidera-t-on à créer un prix du public ?
Crossing the Tide. Pavillon du Tuvalu, Arsenale © Le Curieux des arts Antoine Prodhomme. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 7 mai & 27 octobre 2015
À la folie. Le Pavillon du Tuvalu avec Crossing the Tide à l'Arsenale. Pas besoin d'explication tellement la démarche du taiwanais Vincent J.F. Berghuis est limpide, de suite. Discours en concordance avec le thème des futurs de cette 56ème Biennale. L'eau telle la couleur des canaux vénitiens, des passerelles au ras de celle-ci comme une souvenance de l'acqua alta, une brume. Rien de plus, tout est dit. Le changement climatique. L'élévation des mers. Des îles submergées de l'Océan Pacifique. La disparition de nations. Pourquoi le Pavillon du Tuvalu, participant pour la deuxième année à la Biennale de l'art, n'a-t-il pas retenu l'attention du jury ?
rêvolutions. Pavillon de France /// Canadassimo. Pavillon du Canada, Giardini © Le Curieux des arts Gilles Kraemer. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 7 mai & 27 octobre 2015
Faut-il que encore que ceci fonctionne six mois après !
Deux des trois arbres du Pavillon de France de rêvolutions de Céleste Boursier-Mougenot avaient décidé de ne plus avancer ce 27 octobre, bloqués, regardant avec envie leur compagnon, abrité à l'intérieur de l'édifice ouvert à tous les vents, qui continuait à se mouvoir.
Pas mieux loti le Pavillon du Canada avec Canadassimo de BGL art collective (Jasmin Bilodeau, Sébastien Giguère, Nicolas Laverdière) à quelques mètres dans lequel le réseau sinueux de colombages se déversant dans les parois de verre du pavillon et qui recevait des pièces de monnaie - seulement des euros - de la part des visiteurs ne fonctionnait plus. Dommage pour le joyeux foutraque de ce pavillon, enchâssé dans un échafaudage, le plus ludique de cette Biennale, qui invitait à traverser un magasin alimentaire, un espace de vie en travaux, un atelier dans lequel s'entassent des centaines de boîtes de conserve dégoulinantes de peintures de couleurs avant d'accéder par un escalier à une terrasse surplombant les Giardini. Accumulation, sur-consommation, bricolage, matériaux recyclés, de nombreuses références aux modes de vie nord-américaines.
GLOBAL MYOPIA (pencil & paper). Pavillon de l'Uruguay © Le Curieux des arts Gilles Kraemer. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 7 mai & 27 octobre 2015
Le choix du public, manifestement celui du Pavillon de l'Uruguay avec GLOBAL MYOPIA (pencil & paper) de Marco Maggi. Immense sculpture sur les murs suggérant des circuits informatiques, des vues aériennes de villes imaginaires, sculpture ronde-bosse de quelques centimètres d'épaisseur composée de cartons autoadhésifs blancs.
Pavillon de la Grande-Bretagne, Giardini © Le Curieux des arts Gilles Kraemer. 56ème exposition Internationale d'Art - la Biennale di Venezia. 7 mai & 27 octobre 2015
Du Pavillon de la Grande-Bretagne de Sarah Lucas, j'ose quelques photographies les plus sages de ses sculptures. Nous retiendrons que les cigarettes blondes ont sa préférence ainsi que la couleur jaune. Très bon choix d'ailleurs que cette couleur jaune tapante. La seule chose à retenir de ce pavillon.
Gilles Kraemer & Antoine Prodhomme (déplacement à titre personnel)
56. Esposizione Internationale d'Arte / la Biennale di Venezia
9 mai – 22 novembre 2015
Giardini & Arsenale, Venise
Internet www.labiennale.org