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Publié par Gilles Kraemer

 

Une forêt de Birnam qui n'avance pas, c'est le comble pour cette sapinière immobile ! Pourquoi cet ajout d'une allusion au Brexit dans le texte, ce travers dans lequel se complaisent trop les metteurs en scène ? 

 

Parfois grand-guignolesque ce Macbeth de l'Odéon dans cette création scénique et scénographique de Stéphane Braunschweig, installée dans un double décor. Des hauts murs carrelés de blanc dans lesquels le drame dérisoire du pouvoir, de sa conquête à sa perte se déroule. Une cuisine, un laboratoire d'usine de plats alimentaires, un institut médico-légal, une salle de bain, un abattoir, une clinique. Autant de lieux dans lesquels pourrait se tenir ce huis clos. L'autre décor ? Une salle à manger, table bien mise, fleurs blanches sur la table, tout y est au millimètre, boiseries aux peintures Louis XIV, un immense tableau plagiant très mal Pondormo ou Bronzino qui s'ouvrira pour laisser s'enfuir Macbeth.

 

Chloé Réjon et Adama Diop - Macbeth © Thierry Depagne

Mais le sang sous-tendant ce drame, dans lequel se complaisent les Macbeth n'éclaboussera pas les murs. De sa couleur il rougira les mains et la chemise de Macbeth et conférera un air grand-guignol à la tête de Macduff. Rien d'autre. Dans cet enfermement qui ne laissera aucun échappatoire à Macbeth (Adama Diop) et à son épouse (Chloé Réjon), comme les jouets de leur folie meurtrière les poussant à tuer le roi Duncan pour accéder au trône d'Ecosse puis Banco. Pantins des prédictions des trois sorcières qu'ils ne comprennent pas ou qu'ils refusent de comprendre tellement la forêt en marche paraît improbable et totalement absurde. 

 

Chloé Réjon et Adama Diop - Macbeth © Thierry Depagne

Grand-guignolesque des trois sorcières toujours assises sur des seaux qui recueillent leur urine ? leur excrément ? mais certainement leur nouveau-né pour la seconde prédiction à Macbeth, se complaisant dans une folie à laquelle il ne pourra plus échapper. Superbe présence et complicité dans le regard des trois sorcières. Cette triade entre Virginie Colemyn, Boutaïna El Fekkak et Alison Valence est formidable de justesse dans la scène de l'énumération de composants improbables de la mixture du chaudron-bassine dans lequel Macbeth se trempe les pieds, comme le baptisé d'une messe noire. 

Jeu adapté de Chloé Réjon, dans une interprétation attendue dans la scène du somnambulisme et ne convainquant pas. Que vient faire ce sein que l'on ne saurait voir ? Elle a beau se frotter les mains, l'émotion ne sourd pas. Adama Diop, son époux, un pantin qui ne comprend pas ce qui lui arrive jusqu'au sursaut de l'attaque du château, moment où l'émotion passe enfin. Plutôt Macduff que Macbeth cette pièce avec le très convainquant Jean-Pierre Vidal, dans son dialogue avec Malcolm. Un bel instant ou comment retourner une situation à son avantage.

 

Un xième Macbeth, lisse comme les applaudissements de politesse le soir de cette première.

 

Christophe Brault et Adama Diop - Macbeth © Thierry Depagne.

Gilles Kraemer

Orchestre, 3ème rang, place achetée

vendredi 26 janvier 2018. Première à l'Odéon - Théâtre de l'Europe

 

William Shakespeare, Macbeth (1606)

26 janvier – 10 mars 2018

Odéon - Théâtre de l'Europe, Paris.

Création. Mise en scène et scénographie Stéphane Braunschweig

 

Christophe Brault. Duncan. Portier. Meurtrier. Médecin écossais.

David Clavel. Banquo. Meurtrier. Vieux Siward.

Virginie Colemyn. Sorcière. Vieille femme. Dame de compagnie.

Adama Diop. Macbeth.

Boutaïna El Fekkak. Sorcière. Lady Macduff.

Roman Jean-Elie. Malcolm. Seigneur écossais.

Glenn Marausse. Capitaine en sang. Lennox. Meurtrier. Seyton.

Thierry Paret. Ross.

Chloé Réjon. Lady Macbeth.

Jordan Rezgui. Donalbain. Fléance. Fils Macduff. Jeune Siward.

Alison Valence. Sorcière. Messager. Serviteur.

Jean-Philippe Vidal. Macduff. Meurtrier. 

 

traduction Daniel Loayza et Stéphane Braunschweig

collaboration artistique Anne-Françoise Benhamou; collaboration à la scénographie Alexandre de Dardel

lumière Marion Hewlett; costumes Thibault Vancraenenbroeck

son Xavier Jacquot; maquillages/coiffures Karine Guillem

vidéo Maïa Fastinger; assistante à la mise en scène Laurence Kélépikis

assistante aux costumes Ericka Selosse; stagiaire à la mise en scène Isis Fahmy

 

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Un Macbeth conformiste de petit joueur<br /> Pour cette mise en scène de MACBETH, le directeur du théâtre de l'Odéon Stéphane Braunschweig est étrangement crédité de la co-traduction de la pièce de Shakespeare. C'est étrange car en réalité toute la traduction à été réalisée à cent pour cent par Daniel Loaysa… Les contributions du directeur de l'Odéon se sont limitées à quelques demandes de réécritures et d’adaptation à son traducteur. Il faut rappeler qu'une traduction est créditée de droits d'auteur conséquents liés non seulement à la diffusion de l'œuvre mais surtout à sa représentation… Pareil ou plutôt pire pour la scénographie dont le directeur de l'Odéon est crédité comme concepteur à part entière. Or à part quelques brouillons et vagues notes, toute la scénographie et conception des décors ont été entièrement réalisés par Alexandre de Dardel, qui n'apparaît sur le programme qu'en tant qu' assistant… Le brouillon de Braunschweig à été respecté d'ailleurs, des empilement de boîtes : ce qui se fait de plus conventionnel depuis des lustres au théâtre. Le salaire de directeur de l'Odéon, également metteur en scène d’opéras, est-il donc si faible que ce dernier ait besoin de ‘taper' généreusement sur celui de ses camarades ?<br /> Quant à la mise en scène 2018 du Macbeth de Stéphane Braunschweig, quoi de neuf ? Pas grand-chose à vrai dire. C'est une version ‘light' de Shakespeare, désincarnée et lourdaude. Certaines scènes ont été supprimées comme les réapparitions des sorcières et celle de la déesse Hécate, comme si la présence de la magie en 2018 était encore choquante. La direction d'acteur n’est pas non plus convaincante. Pour faire branchouille, on parle ‘Brexit’ en lieu et place du royaume d’Ecosse… Stéphane Braunschweig dans cette version du Macbeth n'a laissé pratiquement aucune marge d'interprétation à sa troupe. La moindre des inflexions vocales de ses acteurs est chez lui matière à contrôle et surveillance. On abouti donc à un lissage très neutre et monotone de la diction dans cette mise en scène. Comme on est loin de la magie verbale de Welles (revoir d’urgence son Macbeth !) et des grands dramaturges anglais ! Que dire du couple maudit Macbeth et Lady Macbeth. Tout simplement pas crédible. La diction et les placements souvent hésitants d’Adam Diop en font un Macbeth de bande dessinée. Et les seules ‘trouvailles’ du metteur en scène Braunschweig pour conférer à Lady Macbeth/Chloé Réjon une épaisseur démoniaque sont ses assez ridicules exhibitions et trémoussements sur une table de la cuisine qui sert aussi de table à manger. Le public est habitué au visionnage de petites culottes sur les affiches, et ici comme ailleurs, pas de quoi fouetter un chat… On s'ennuie donc en réalité très vite dans cette mise en scène, et même dès le début, dès l’apparition des sorcières grimées en parturiantes de collège jouant à Mardi-Gras. Mise en scène sans âme, sans noirceur ni profondeur. Du Shakespeare light (le bureau du roi est une copie de celui de l’Elysée. Quel audace !...), finalement assez dans l’air du temps : conformiste.
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U
Un Macbeth conformiste de petit joueur<br /> Pour cette mise en scène de MACBETH, le directeur du théâtre de l'Odéon Stéphane Braunschweig est étrangement crédité de la co-traduction de la pièce de Shakespeare. C'est étrange car en réalité toute la traduction à été réalisée à cent pour cent par Daniel Loaysa… Les contributions du directeur de l'Odéon se sont limitées à quelques demandes de réécritures et d’adaptation à son traducteur. Il faut rappeler qu'une traduction est créditée de droits d'auteur conséquents liés non seulement à la diffusion de l'œuvre mais surtout à sa représentation… Pareil ou plutôt pire pour la scénographie dont le directeur de l'Odéon est crédité comme concepteur à part entière. Or à part quelques brouillons et vagues notes, toute la scénographie et conception des décors ont été entièrement réalisés par Alexandre de Dardel, qui n'apparaît sur le programme qu'en tant qu' assistant… Le brouillon de Braunschweig à été respecté d'ailleurs, des empilement de boîtes : ce qui se fait de plus conventionnel depuis des lustres au théâtre. Le salaire de directeur de l'Odéon, également metteur en scène d’opéras, est-il donc si faible que ce dernier ait besoin de ‘taper' généreusement sur celui de ses camarades ?<br /> Quant à la mise en scène 2018 du Macbeth de Stéphane Braunschweig, quoi de neuf ? Pas grand-chose à vrai dire. C'est une version ‘light' de Shakespeare, désincarnée et lourdaude. Certaines scènes ont été supprimées comme les réapparitions des sorcières et celle de la déesse Hécate, comme si la présence de la magie en 2018 était encore choquante. La direction d'acteur n’est pas non plus convaincante. Pour faire branchouille, on parle ‘Brexit’ en lieu et place du royaume d’Ecosse… Stéphane Braunschweig dans cette version du Macbeth n'a laissé pratiquement aucune marge d'interprétation à sa troupe. La moindre des inflexions vocales de ses acteurs est chez lui matière à contrôle et surveillance. On abouti donc à un lissage très neutre et monotone de la diction dans cette mise en scène. Comme on est loin de la magie verbale de Welles (revoir d’urgence son Macbeth !) et des grands dramaturges anglais ! Que dire du couple maudit Macbeth et Lady Macbeth. Tout simplement pas crédible. La diction et les placements souvent hésitants d’Adam Diop en font un Macbeth de bande dessinée. Et les seules ‘trouvailles’ du metteur en scène Braunschweig pour conférer à Lady Macbeth/Chloé Réjon une épaisseur démoniaque sont ses assez ridicules exhibitions et trémoussements sur une table de la cuisine qui sert aussi de table à manger. Le public est habitué au visionnage de petites culottes sur les affiches, et ici comme ailleurs, pas de quoi fouetter un chat… On s'ennuie donc en réalité très vite dans cette mise en scène, et même dès le début, dès l’apparition des sorcières grimées en parturiantes de collège jouant à Mardi-Gras. Mise en scène sans âme, sans noirceur ni profondeur. Du Shakespeare light (le bureau du roi est une copie de celui de l’Elysée. Quel audace !...), finalement assez dans l’air du temps : conformiste.
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