Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Publié par Gilles Kraemer

Gilles Kraemer (déplacement et séjour personnel à Rome)

 

Quatre centième anniversaire de l’élection, au siège pontifical d’Urbain VIII, né Maffeo Barberini (Florence 1568 - 1644 Rome). Occasion rêvée pour les Gallerie Nazionali di Arte Antica - gallerie Barberini, d’une éblouissante et somptueuse exposition dédiée à ce pontificat, le plus long du Seicento (1623-1644) et à sa famille. L’Immagine sovrana. Urbano VIII e i Barberini célèbre, dans la justesse du commissariat de Maurizia Cicconi, Flaminia Gennari Santori & Sebastian Schütze, l’action politique, le pouvoir pontifical, la pensée philosophique, le savoir scientifique, la politique artistique, le mécénat, sans oublier le népotisme de cette famille.

Francesco Mochi, Statuette équestre de Carlo Barberini, ca 1630. Bronze pour la statue, noyer pour le piédestal. Héritiers Barberini //  Gian Lorenzo Bernini, Buste d'Urbain VIII, 1656-1658. Bronze. Collection privée © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023.

Francesco Mochi, Statuette équestre de Carlo Barberini, ca 1630. Bronze pour la statue, noyer pour le piédestal. Héritiers Barberini  © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023.

Le palais romain des Barberini, symbole visible de leur puissance et de leur magnificence, accueille cette monstration incontournable dans le Grand tour des expositions européennes de ce printemps 2023.

Gian Lorenzo Bernini (1632-1633), Urbain VIII, 1632-1633. Marbre. Rome, Palazzo Barberini présenté dans la Salle ovale face au buste en marbre du poète Francesco Bracciolini de Giuliano Finelli, 1630-1631, Londres, Victoria and Albert Museum © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023.

Pour la première fois, les chefs-d’œuvre encore visibles ici - Urbano VIII, marbre de Gian Lorenzo Bernini (1632-1633) présenté dans la Salle ovale face au buste du poète Francesco Bracciolini de Giuliano Finelli (1630-1631), prêt londonien - ou disséminés dans les musées du monde entier, sans oublier le Buste d’Urbano VIII (1656-1658) de Bernini, bronze de la collection Corsini commandé par le cardinal Antonio Barberini -, sont le miroir fastueux du pontificat d’Urbain VIII et du Baroque. Instants rêvés pour re-visiter l’Urbs.

Triomphe du népotisme dans la Rome papale. Le prélat Francesco Barberini (1528-1600), oncle de Maffeo Barberini, futur Urbain VIII, initia la cursus honorum curiale de son neveu, jusqu’à la barrette rouge en 1606 grâce à l’intervention d’Henri IV puis l’accession au siège de saint Pierre le 6 août 1623. Urbain VIII - prénom choisi en référence à l’urbs et à l’urbanista, un Principe Urbanissimo comme le surnomme Sebastian Schütze dans un essai du catalogue - fit de même pour la carrière de ses neveux : les cardinaux Francesco (1597-1679) et Antonio (1608-1671). De son frère ainé Carlo (1562-1630), nommé général de la Sainte Église romaine, l’exposition présente un des plus extraordinaires bronzes émotionnels du Baroque, d’une patine exceptionnelle, la fabuleuse Statue équestre de Francesco Mochi (ca 1630), sans aucun doute le modèle de présentation pour un monument commémoratif au duc, la source en étant le monument équestre d’Alessandro Farnese à Piacenza du même Mochi.

Ludovico Carracci (Bologna 1555 - Bologna 1619), San Sebastiano nella cloaca Maxima, 1612. Olio su tela. 167 x 233 cm.. Los Angeles, The J. Paul Getty Museum  //  Caravaggio, Michelangelo Merisi (Milano 1571 – Porto Ercole 1610), Sacrificio di Isacco. Olio su tela. 104 x 135 cm.. Firenze, Gallerie degli Uffizi © Alberto Novelli. Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023. Section Plaisir et Stratégie

© Alberto Novelli. Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023. Section Plaisir et Stratégie.

Michelangelo Merisi detto Caravaggio - Sacrificio di Isacco (1603) © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023. Section Plaisir et Stratégie.

Ludovico Carracci (Bologna 1555 - Bologna 1619), San Sebastiano nella cloaca Maxima, 1612. Olio su tela. 167 x 233 cm.. Los Angeles, The J. Paul Getty Museum © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023. Section Plaisir et Stratégie.

Ouvrant la première section "Piacere e Strategia", affirmation du goût raffiné de ce prince de l’Église, la confrontation très forte Michelangelo Merisi detto Caravaggio - Sacrificio di Isacco (1603) et San Sebastiano gettato nella Cloaca Massima (1612) de Ludovico Carracci, deux toiles commandées par le futur pape alors cardinal. Valentin de Boulogne et le plaisir de revoir le fabuleux Sansone (1631) présenté dans la même salle que l’extraordinaire et gigantesque Allegoria dell’Italia (1628-1629) où se voient des abeilles, symbolique héraldique de la famille (1). Abeilles dans la symbolique de l’intelligence, de la perspicacité, de l’industrieux, de la sociabilité, un message politique et idéologique très clair devant être compris de tous. Insecte que l'on retrouve sculpté sur les murs du palais et dans les gravures mythologiques d’Andrea Sacchi.

Nicolas Poussin (Les Andelys 1594 - Roma 1665), Distruzione del Tempio di Gerusalemme, 1635. Olio su tela. 147 x 198 cm.. Vienna, Kunsthistorisches Museum, Gemäldegalerie  //  au premier plan, Buste du cardinal de Richelieu, 1640-1641, marbre de Gian Lorenzo Bernini, Paris, Musée du Louvre © Alberto Novelli. Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023. Section La magnificience des Abeilles.

Nicolas Poussin (Les Andelys 1594 - Roma 1665), Distruzione del Tempio di Gerusalemme, 1635. Olio su tela. 147 x 198 cm.. Vienna, Kunsthistorisches Museum, Gemäldegalerie © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023. Section La magnificience des Abeilles.

Commande publique à Nicolas Poussin du Martirio di sant-Erasmo (1629), un des chefs d’œuvre absolu du normand (1) et, plus loin, la Morte de Germanico (1627) commandée par Francesco Barberini comme le fut également la Distruzione del Tempio di Gerusalemme (1638) offerte à l’empereur du Saint Empire Romain par le cardinal Antonio Barberini mais devant être interprétée tel un subtil message diplomatique au nouveau monarque relatif aux visées menaçantes qu’avait la maison des Augsbourg sur le nord de l’Italie comme le souligne Anthony Colantuono dans la notice. Une véritable somme que la lecture de ces notes approfondies des œuvres présentées, un plaisir que l’on n’éprouve pas dans tous les catalogues français.

Carton de Romanelli, Le baptême du Christ, 1651 et tapisserie // carton de Pietro da Cortona, Constantin combattant le lion, ca 1636 et tapisserie  //  carton de Fabio Cristofani, Election d'Urbain VIII, 1667 et tapisserie    © Alberto Novelli. Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023.

Dans le salon Pietro da Cortona, les tapisseries © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023.

Spectaculaires tapisseries, tissées de laine, lin, soie, fils d’argent et d’or, entre 1627 et 1679, tombées des métiers de la manufacture Barberini voulue par le cardinal Francesco Barberini. Comme le développe James Gordon Harper, la tapisserie si elle orne les murs peut se monnayer rapidement, être déposée au Mont-de-piété, démontre la magnificence de son commanditaire. Accrochées dans le grand salon Pietro da Cortona, elles sont accompagnées de leurs cartons dus à Pietro di Cortona, Giovan Francesco Romanelli ou Fabio Cristofani – la série des dix de la Vie du pape Urbain VIII fut pensée comme devant être présentée dans le grand salon Cortone -. Dirigée par le flamand Jacob van den Vliete (italianisé Giacomo della Riviera), cette manufacture le fut, après sa mort par son épouse Catarina puis sa belle-sœur Maria Maddalena, fait suffisamment rare car les lissiers à cette époque étaient majoritairement des hommes, pour noter l’importance des deux sœurs della Riviera.

Vénus jouant de la harpe, ca 1633, de Giovanni Lanfranco, Rome, Palazzo Barberini  //  Harpe Barberini, 1633, de Girolamo Acciari, sculptée par Gioavanni Tubi, Rome, Museo Nazionale degli Strumenti Musicali  //  Portrait du castra Marcantonio Pasqualini avec Apollon et Marsyas d’Andrea Sacchi, ca 1641, New York, Metropolitan Museum of Art © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023, section Hic Domus.

Valentin de Boulogne (Coulommiers-en-Brie 1591/94 - Roma 1632), Sansone, 1631. Olio su tela. 135,6 x 102,8 cm.. Cleveland, The Cleveland Museum of Art, Mr. and Mrs. William H. Marlatt Fund 1972.5  //  Nicolas Poussin (Les Andelys 1594 - Roma 1665), Morte di Germanico, 1628. Olio su tela. 148 x 198,1 cm.. Minneapolis, Minneapolis Institute of Art, The William Hood Dunwoody Fund © ringraziamenti Uffizio stampa.

Le Portrait du castra Marcantonio Pasqualini avec Apollon et Marsyas d’Andrea Sacchi (ca 1641), ainsi que Vénus jouant de la harpe (ca 1633) de Giovanni Lanfranco sont mis en relation avec la stupéfiante Harpe Barberini (1633) de Girolamo Acciari, sculptée par Gioavanni Tubi.

Urbain VIII impose un nouveau style à la diffusion immédiate : le Baroque. Rome, l’Italie, l’Europe adhèrent à ce mouvement né au cœur de Rome, au palais Barberini. Le colossal Baldaquin de Saint-Pierre conçu par Bernini (1626-1633), l’immense fresque de Pietro da Cortona et ses élèves pour le plafond du grand salon du palais Barberini : le Trionfo della Divina Provvidenza (1632-1639). Face sombre cependant avec la démolition partielle d’un monument de la Rome des Césars lorsque le pape demande la destruction de la structure métallique de 152 tonnes soutenant le toit du pronaos du Panthéon. Quod non fecerunt Barbari, fecerunt Barberini. Campagne de communication avec le fallacieux prétexte de la nécessité de matériaux pour le Baldaquin; seulement 2% du métal antique fut remployé. La réalité en était l’emploi pour des pièces d’artillerie. Des rivets de ce monument antique furent offerts en cadeau.

Ce regard dans la récupération de l’art antique se retrouve dans une toile de Jean Lemaire, Anacoreta e rovine classiche (1637-1638), commandée par le souverain espagnol Philippe IV auprès duquel le cardinal Francesco eut une mission diplomatique. L’obélisque d’Adrien érigé à la mémoire de son amant Antinoüs, figurant sur cette toile, appartint un temps aux Barberini avant d’être transféré au Vatican puis érigé dans les jardins romains du Pincio.

© Alberto Novelli. Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023, section Le théâtre des émerveillements.

Filippo Gagliardi (Roma 1606-1659) et Filippo Lauri (Roma 1623-1694), Carosello a Palazzo Barberini in onore di Cristina di Svezia nel Carnevale del 1656, ca 1656-1657. Huile sur toile. 230 x 340 cm.. Museo di Roma, Rome © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023.

"Il Teatro degli Stupori", douzième section en conclusion de cette exposition. Le Palais, l’intérieur et l’extérieur, devient un espace scénographique prêt à accueillir de grands événements mis en scène par cette famille, façon de toujours affirmer son pouvoir, même après le décès de l’oncle. Le Carosello nel cortile del Palazzo Barberini in onore di Cristina di Svezia il 28 febbraio 1656 de Pietro Gagliardi et Filippo Lauris. Ce carrousel de cavaliers en blanc et bleu aux couleurs de la Reine nouvellement convertie au catholicisme et en rouge et or celles du pape Alexandre VII fut commandé par la famille Barberini et imaginé par Giovan Francesco Grimaldi dans la cour du palais Barberini alle Quattro Fontane. Événement nocturne scénographié par Giovan Battista Gagliardi, suivi par 3 000 personnes entassées dans les tribunes. Regardez attentivement ce tableau avec les chars de l'Amour et de Cupidon, du Soleil, du Dédain et des Furies de cette cavalcade, un spectateur tapant sur la tête d'un autre habillé en Arlequin en l’enjoignant de se rasseoir, des exclus de cette exceptionnelle soirée essayant d'entrer par force et bousculant les gardes. Le soleil des Barberini luisait toujours au-dessus de la Rome papale. (2). Deux grandes peintures d’Andrea Camassei : La strage dei Niobidi (1630) et Il riposo di Diana, (1638-1639) ont été spécialement restaurées pour cette exposition.

Horoscope d’Urbain VIII, inséré dans les feuillets du procès de l’abbé Morandi. Rome, Archives de l’État, 1630 © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023.

Côté sombre, ne pas mécontenter les puissants. L’abbé de Santa Passata, Orazio Morandi fut arrêté après que l’on eut trouvé dans son couvent des horoscopes dont celui du successeur de saint Pierre dont il prédestinait la mort en 1630. Il finit sa vie, incarcéré à Tor di Nona, dans des circonstances suspectes. Cela ne renvoie-t-il pas aux Bas fonds du Baroque, i bassifondi del barocco ? (3)

(1) Trois toiles vues au Met, New York, 7 octobre 2016 - 16 janvier 2017, prolongée au 22 janvier 2017, Valentin de Boulogne. Beyond Caravaggio, commissariat d’Annick Lemoine & Keith Christiansen. Samson faisait la couverture de ce catalogue. Valentin de Boulogne : Beyond Caravaggio. Metropolitan Museum of Art, New York - Valentin de Boulogne. Réinventer Caravage. Le Louvre, Paris - (lecurieuxdesarts.fr)

(2)  Au sujet de ces fastueux carnavals et fêtes baroques, des Entrées, de cette pompa intriotusL'éphémère char d'or du Carnaval romain du prince Giovan Battista Borghese. Johann Paul Schor e l'effimero splendore dei carnavali barrochi - Gallerie degli Uffizi - (lecurieuxdesarts.fr)     

(3) Les Bas-fonds du baroque. La Rome du vice et de la misère / I bassifondi del barocco. La Roma del vizio e della miseria. Entretien avec Éric de Chassey, directeur de l'Académie de France à Rome – Villa Médicis - (lecurieuxdesarts.fr)

© Alberto Novelli. Rome, Gallerie Barberini, mostra L’immagine sovrena. Urbano VIII e i Barberini, avril 2023.

L'immagine sovrana. Urbano VIII e i Barberini / L’image souveraine. Urbain VIII et les Barberini

18 marzo - 30 luglio 2023 / 18 mars - 30 juillet 2023

Gallerie Nazionali di Arte Antica - Palazzo Barberini - Rome

Commissariat de Maurizia Cicconi conservatrice aux Gallerie Nazionali di Arte Antica, Flaminia Gennari Santori directrice des Gallerie Nazionali di Arte Antica & Sebastian Schütze, historien de l’art [président de l’Université de Vienne depuis juin 2022].

Mécénat de Marco Jellinek et Officina Libraria pour l’édition de l’indispensable catalogue, un vrai ouvrage scientifique, essais pertinents, parfaite mise en page et textes dans un corps de caractère lisible, notices de rêve, bibliographie impressionnante. De quoi inspirer certains catalogues français. 432 pages. Prix 45 €. (service de presse de cette institution).

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article