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Publié par Gilles Kraemer

Gilles Kraemer (envoyé à Toulouse)

Niki de Saint Phalle, Nana Dawn (jaune), 1995. Résine peinte. Saint-Tropez, fondation Linda et Guy Pieters face au Monstre du Loch Ness, 1993. Miroir et céramique sur structure en polyester. Donation de l'artiste à Nice, collection Mamac  © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.

Catherine Marie-Agnès Fal de Saint Phalle, dite Niki de Saint Phalle (Neuilly-sur-Seine 1930 – 2002, San Diego, États-Unis). Loin des Nanas, l’image où l’histoire de l’art l’enferme, Les Abattoirs à Toulouse ont voulu consacrer, à cette artiste franco-américaine, une exposition autour de ses années 1980 et 1990.

Comme le souligne Annabelle Ténèze, co-commissaire avec Lucia Pesapane, cette exposition parle de joie, de maladie, d’acceptation de l’autre, un mélange des sentiments. Tout simplement de la vie. Elle n’est pas que la femme des Nanas, c’est une femme de liberté, engagée, cohérente. 

Niki de Saint Phalle, Le diable, 1989. Polyester peint © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.

Pourquoi cette double décennie, cette œuvre tardive que l’on explore peu chez nombre d’artistes alors qu’il s’agit de la réalité de la vie. C’est un moment important pour Niki. Elle a 50 ans, elle est totalement libre de sa création. Ce sont les années des commandes, celles du partage de son œuvre dans l’espace public avec ses Fontaines Stravinsky (1982) et de Château-Chinon (1988) imaginées avec Jean Tinguely (1). Un Cyclop qu’elle implante dans la forêt de Milly. Un Jardin des Tarots en Toscane aux sculptures monumentales inspirées des vingt-deux arcanes majeurs du Tarot de Marseille. Ce jardin hors du temps, elle l’entreprend entre 1978 et 1998, comme un chantier de cathédrale avance Annabelle Ténèze, comme une promenade ésotérique, une image d’elle dans laquelle elle renaît. Le coût de cette œuvre monumentale qui lui revint entre quatre et cinq millions de dollars, elle le finance à un tiers… avec une ligne de parfums à son nom, sous l’image deux serpents colorés entremêlés, déclinée du parfum à l’eau de toilette ou à la crème satinée essentielle. Lancement avec éclat à New York le 30 août 1982 ; l’intégralité des recettes étant investie dans ce jardin. Comme ne pas songer à Christo et à Jeanne-Claude.

Bloum Cardenas devant Le champignon magique de Niki de Saint Phalle, 1989. Polyester, métal, mosaïque de miroirs © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.

Niki de Saint Phalle, Nana Ballon Yellow, 2022. Vinyle plastique. Première édition 1968. © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.

Monstre du Loch Ness, 1993. Miroir et céramique sur structure en polyester. Donation de l'artiste à Nice, collection Mamac © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.

La salle du Jardin des Tarots, Fontaine aux quatre Nanas, 1974-1991. Polyester peint. Nice, donation de l’artiste, collection du Mamac © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.

Niki de Saint Phalle, pin's, sans date. Métal doré et émaillé © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.

L’art qu’elle souhaite accessible à tous, elle le multiplie avec du mobilier : fauteuil, miroir, vase, chandelier, le déclinant en bijou, pin’s, foulard, sans aucune négation de cet art industriel. Et même des Nanas gonflables, ces dizaines de nanas qui forment un mur, tel un moucharabieh, à l’entrée de l’exposition. Derrière lui, Le monstre du Loch Ness nous accueille, dans une ambiance boîte de nuit car son corps recouvert de découpes de miroirs renvoie mille lumières sur les murs, le sol et le plafond. Une ambiance de fête. Un kaléidoscope du miroir, dans le jeu de l’interrogation du qui sommes-nous ?, comment nous reflétons-nous ?, nous qui sommes des êtres changeants et fragmentés tel Le champignon magique, Janus homme-femme.

Niki de Saint Phalle, Le sida c’est facile à éviter, 1987, livre d’artiste // Niki de Saint Phalle, Le sida tu ne l’attraperas pas…, 1990, livre d’artiste, en collaboration avec Philip Mathews ; les dessins de cet ouvrage furent exposés du 30 novembre 1990 au 28 janvier 1991, Niki de Saint Phalle. Lutte contre le sida, commissariat de Daniel Marchesseau, musée des arts décoratifs, Paris © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.

Cette fête dans ses œuvres, cet art joyeux des messages, Niki a souhaité les transmettre dans les années du sida, par son art au service de la société, de l’autre, de l’éducation de la jeunesse face au virus de l’immuno-déficience humaine. Le sida, c’est facile à éviter, elle l’imagine Peste, monstre sanguin avançant, écrasant des baigneurs en plastique minuscules, entouré de crânes qui sourient. Son écriture parlant directement au cœur et très simplement.   

 

Niki de Saint Phalle & Jean Tinguely, La Fontaine Stravinsky, 1983 © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, mardi 25 octobre 2022.

© photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, mardi 25 octobre 2022.

(1) Manifestement la mairie de Paris et ses différents maires, sa mairesse actuelle, sous les yeux des présidents qui se sont succédés au Centre Pompidou, ne manifestaient pas une grande diligence à l’égard de la restauration de la Fontaine Stravinsky aménagée en 1983, dans le cadre d’une commande publique de la Ville de Paris. Longue et lente détérioration, machinerie de Jean Tinguely ne fonctionnant plus, sculptures ne tournant plus, asséchement de la fontaine jusqu’à ce qu’elle devienne un cloaque. Jusqu’à ce que le projet de restauration soit lauréat du budget participatif en… 2018, pour un coût global de 1,6 millions d’€. Début des travaux… quatre ans plus tard… en avril 2022... le temps de la réflexion et de la maturation de la direction des affaires culturelles de la ville, conservation des œuvres d’art religieuses et civiles… pour une fin des travaux prévue au printemps 2023. A suivre. En octobre 2022, travaux peu avancés, si ce n'est que la fontaine est entourée de barrières grises qui se proclament vertes !

Les Abattoirs est une institution inédite née de la fusion du Musée d'art moderne et contemporain de la ville de Toulouse et du Fonds régional d'art contemporain.

Niki de Saint Phalle, Les baigneurs, ca 1983. Polyester, peinture polyuréthane © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.

Niki de Saint Phalle. Les années 1980 et 1990 : l’art en liberté

7 octobre 2022 - 5 mars 2023

Abattoirs, Musée d'art moderne et contemporain - Frac Occitanie Toulouse

Entrée 8 euros. Internet https://www.lesabattoirs.org/

Commissariat : Lucia Pesapane, commissaire indépendante ; Annabelle Ténèze, conservatrice en chef, directrice des Abattoirs et Audrey Palacin - Scénographie : Pascal Rodriguez.

Lucia Pesapane, Bloum Cardenas (petite-fille de Niki), Annabelle Ténèze © photo Le Curieux des arts Gilles Kraemer, octobre 2022.  

Catalogue. Textes d’Annabelle Ténèze; Lucia Pesapane ; Julie Crenn ; Karine Lacquemant ; Thibault Boulvain ; Mica Gherghescu; Ruba Katrib. 224 pages. Éditions Gallimard. 35 €. Les œuvres exposées ne sont pas toutes reproduites. Chronologie très succincte ; rappelons l’exposition du 30 novembre 1990 au 28 janvier 1991, Niki de Saint Phalle. Lutte contre le sida, commissariat de Daniel Marchesseau au musée des arts décoratifs, Paris et celle du 24 juin au 12 septembre 1993 au musée d’art moderne de la ville de Paris Niki de Saint Phalle l’invitation au musée. Bibliographie très sélective.

 

 

 

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