Un rendez-vous à ne pas oublier. Portraits des XVe et XVIe siècles
Gilles Kraemer
Vanitas vanitatum et omnia vanitas.
Vanité des vanités, tout n’est que vanité. Ou souhait de laisser une empreinte de son passage. Empereurs, puissants, aristocrates et citoyens fortunés : autant de portraits européens de la Renaissance incitant au voyage d’Amsterdam, au Rijksmuseum. Plus d'une centaine de chefs-d'œuvre des plus grands peintres, parmi lesquels Holbein, Dürer, Memling et Véronèse, sont à retrouver cet automne dans le cadre de l'exposition Ne m'oubliez pas. Aux XVe et XVIe siècles, les commanditaires, qu'ils soient nobles ou non, sont de plus en plus nombreux à se faire immortaliser. Avec la pensée que l'on se souvienne d'eux. Souviens-toi de moi. Remember me. Mais..., pour certains, le nom a été oublié.
Petrus Christus (ca. 1425-1475), Portrait d’une jeune fille, ca. 1470. Huile sur bois. 29,1 × 22,7 cm.. Gemäldegalerie, Staatliche Museen Berlin.
Ne m’oubliez pas est la première grande exposition consacrée aux Pays-Bas aux portraits de la Renaissance dans l'Europe occidentale. Le portrait emblématique de cette exposition, restera, celui de l'énigmatique Jeune fille (ca 1470) de Petrus Christus, des collections de Laurent de Médicis, prêt insigne de la Gemäldegalerie à Berlin.
Jan Gossaert (vers 1478 – 1532), Portrait d’un homme, peut-être Jan Snoeck, ca 1530. 63,6 x 47,5 cm.. National Gallery of art – Washington.
Comme aujourd'hui où le like Facebook ou Instagram est primordial pour certains, leur seule raison d'être ou façon d'exister, vanité des vanités, tout est vanité, les portraiturés étaient désireux de se montrer sous le meilleur jour. Chaque partie de la composition était mise en scène : expression du visage, symbolisme, posture, arrière-plan et vêtements. Certains mettaient l'accent sur la beauté, d'autres sur le crédit et l'autorité. C'est ainsi que Charles Quint a souhaité asseoir sa puissance en se faisant immortaliser vers 1553 sous les traits d'un empereur romain ou que le hollandais Maarten van Heemskerck a donné l'image d'un peintre à succès, certain de lui, dans son Autoportrait devant le Colisée (1553), souvenir de son voyage romain. Ne m'oubliez pas met en lumière l'image que les individus projettent d'eux-mêmes, autour de thèmes tels que la beauté, l'autorité, l'ambition, l'amour, la famille, l'érudition ou la foi.
Lorenzo Lotto (1480-1556), Marsilio Cassotti et sa femme Faustina, 1523. Huile sur toile. 71 cm x 84 cm.. Museo del Prado, Madrid. Avec Cupidon tout sourire présent au moment de l’échange de vœux lorsque Marsilio place la bague de mariage à l’annulaire de Faustine vêtue de rouge, la couleur préférée des mariées vénitiennes.
Antonello da Messina (1430-1479), Portrait d'un homme. Huile sur bois. 37,4 x 29,5 cm.. Palazzo Madama, Turin. Ou l'ironie du regard. Ce portrait peut avoir été peint lors des derniers mois du séjour d'Antonello à Venise, entre 1475 et 1476 ou bien à Messine, où l'artiste retourna en septembre 1476.
L'exposition réunit des prêts exceptionnels venus de grandes collections européennes ou étasuniennes. Le Portrait d'une jeune fille (ca 1470) de Peter Christus, une des œuvres phares des collections de la Gemäldegalerie et chef-d'œuvre de la Renaissance nordique, voyage pour la première fois depuis 1994. Les visiteurs découvriront également le Portrait d'un homme (1476) d'Antonello da Messina, prêt du Museo Civico d'Arte Antica, Palazzo Madama à Turin. Le gisant en bronze d'Isabelle de Bourbon, l'épouse de Charles le Téméraire (Jan Borman II et Renier van Thienen, 1475-76) de la cathédrale Notre-Dame d'Anvers retrouve ses dix Pleurants en bronze provenant des collections du Rijksmuseum. D'Albrecht Dürer, l'on pourra admirer le dessin d’un Homme africain (1508), conservé à l'Albertina de Vienne et le Portrait d'une jeune femme aux cheveux relâchés en prière (1497), aquarelle du Städel Museum de Francfort. Le Kunstmuseum de Bâle a prêté plusieurs œuvres, dont le Double portrait du bourgmestre Jakob Meyer zum Hasen et de son épouse Dorothea Kannengiesser de Hans Holbein II (1516). La National Gallery of Art de Washington a prêté l’huile sur panneau Portrait de Jan Jacobsz Snoeck (ca 1530) de Jan Gossart et le Muzeum-Zamek w Łańcucie en Pologne, un Autoportrait de Sofonisba Anguissola (ca 1556).
Oui, tu es poussière et à la poussière tu retourneras. In pulverem reverteris...
Pleurants du tombeau d'Isabelle de Bourbon. Bronze. Rijksmuseum - Amsterdam.
Ne m'oubliez pas. Portraits de Dürer à Sofonisba
1er octobre 2021 - 16 janvier 2022
Rijksmuseum – Amsterdam – Pays-Bas