Dans le temps des correspondances photographiques de J. H. Engström
Gilles Kraemer (d’après le dossier de presse).
J. H. Engström, sans-titre de la série Revoir, 2016. Tirage pigmentaire © J. H. Engström, avec l'aimable autorisation de l'artiste et de la galerie Jean-Kenta Gauthier.
Malgré le report des Rencontres de la jeune photographie internationale 2020 en avril 2021 en raison des conditions sanitaires liées à la pandémie du coronavirus (1), le centre d’art contemporain photographique La Villa Pérochon - CACP, à Niort - n'en déplaise à Houellebecq et à sa formule assassine à l'égard de Niort, publiée dans son bouquin Sérotonine "une des villes les plus laides qu'il m'ait été donné de voir" cette préfecture des Deux-Sèvres existe -, continue sa programmation avec J. H. Engström : Anknytningar / Correspondances / Correspondences. Ce titre d’exposition joue des trois langues parlées par l’artiste - le suédois, le français, l’anglais - dans une pratique des changements de perspective dans notre rapport à soi, aux autres et au monde.
J. H. Engström, sans-titre de la série Tout va bien, 2015. Tirage pigmentaire, 125 x 95 cm. © J. H. Engström, avec l'aimable autorisation de l'artiste et de la galerie Jean-Kenta Gauthier.
Né en 1969 dans la région du Värmland en Suède, J. H. Ensgtröm déménage à l’âge de 10 ans à Paris. Il y entame sa formation artistique auprès du photographe Mario Testino puis s’installe en 1993 à Stockholm où il assiste le photographe Anders Petersen (1944) avant de vivre de 1998 à 2000 à New York. Il y rencontrera le photographe et réalisateur Robert Frank qui préfacera son premier livre Shelter / Härbärge, 1998. J.H. Engström vit aujourd’hui entre Smedsby (région du Värmland) et Montreuil, aux portes de Paris.
En écho avec ce centre d’art photographique d’intérêt national, J. H. Engström a investi toutes les pièces de l’institution, présentant plus de 450 photographies mais aussi des projections, dont une inédite, et de nombreuses publications. Il nous plonge dans ses questionnements personnels et sociaux à travers un parcours riche de formes de monstration d’une rare cohérence au regard de la multiplicité des supports. L’exposition examine, à travers une dizaine de séries et travaux réalisés ces derniers vingt ans, les correspondances entre les temps et les espaces d’une vie, les lieux où il vécut, les personnes qui l’ont entouré.
Depuis Trying to Dance (2004) jusqu’à Revoir (2016) en passant par Haunts (2006) ou Tout va bien (2015), il n’a de cesse de revisiter et réactiver son passé en faisant correspondre les lieux de son enfance et les migrations de son foyer, les étapes de sa jeunesse et l’avènement de la maturité, chaque série constituant le bilan provisoire d’une existence.
J. H. Engström, sans-titre de la série From Back Home, 2009. Tirage chromogénique d’époque 30 x 24 cm., issu d’un ensemble unique de 100 tirages d’époque © J. H. Engström, avec l'aimable autorisation de l'artiste et de la galerie Jean-Kenta Gauthier.
Mêlant séries photographiques et films, cette exposition offre une déambulation dans son œuvre, avec la récurrence de la définition de soi, la recherche des origines et l’interprétation du monde. Elle s’ouvre sur la vidéo Här / Ici / Here (2018), réalisée en Suède et dans laquelle l’artiste rend compte de son environnement proche pour y déceler les traces de sa mémoire. Le parcours, ponctué d’autoportraits réalisés à différentes époques, se poursuit avec les séries Sketch of Paris (2013) - compte-rendu de deux décennies passées dans la capitale française -, From Back Home (2009) - un retour avec Anders Petersen sur les traces de leurs enfances dans leur région natale commune du Värmland. Une salle est dédiée aux différentes publications de l’artiste, les poèmes visuels Try poetry (de la série Haunts, 2006) et Towards Light (2019).
J. H. Engström explore les significations multiples des lieux de nos existences, à l’instar des photographies de lits (de la série Trying to Dance, 2004) - le lit, théâtre de nos pulsions physiques et matérielles mais aussi véhicule des voyages immatériels de nos rêves -. L’artiste interroge également notre rapport au corps, et par là même notre place dans le monde, à travers un ensemble de nus frontaux (de la série Trying to Dance, 2004) et le film inédit Djuret / L’Animal / The Animal (2020).
J. H. Engström, sans-titre de la série Tout va bien, 2015. Tirage pigmentaire, 95 x 125 cm. © J. H. Engström, avec l'aimable autorisation de l'artiste et de la galerie Jean-Kenta Gauthier.
L’installation vidéo Ordet / Le Mot / The Word (2017) conclut ce parcours dans laquelle il se filme ; il inscrit sur le mur de son atelier les mots qui abritent les notions fondamentales et abstraites à l’origine de ses réflexions, dans les trois langues de sa vie : quand le mot devient une image, que les idées sont exposées et que leur sens est équivoque.
J. H. Engström : Anknytningar / Correspondances / Correspondences
3 juin - 29 août 2020
Villa Pérochon - 64 rue Paul-François Proust - 79000 Niort
tél. 05 49 24 58 18 accueil@cacp-villaperochon.com https://www.cnap.fr/cacp-villa-perochon
Cette exposition est organisée avec le soutien de la galerie parisienne Jean-Kenta Gauthier qui représente cet artiste.
(1) Niort et les Rencontres de la jeune photographie internationale 2020. Appel à candidature pour résidence http://www.lecurieuxdesarts.fr/2019/06/niort-et-les-rencontres-de-la-jeune-photographie-internationale-2020-appel-a-candidature-pour-residence.html