Vierge à l'enfant de Bernardino Luini (c 1481-1532) - Drouot Paris
Dans un temps où Léonard de Vinci est la vedette du musée du Louvre, à égalité avec l'exceptionnelle rétrospective du Greco au Grand Palais, l'opportune célébration du 500e anniversaire de la mort de Léonard permet de proposer sur le marché parisien une œuvre majeure de l’élève de Vinci Bernardino Luini, Vierge à l’Enfant avec Saint Georges et un ange musicien.
Adjugé 2 300 400 €, frais compris, à la limite de l'estimation basse.
Bernardino Luini (c 1481-1532), Vierge à l'Enfant avec saint Georges et un ange musicien. Huile sur panneau 103.5 x 79.5 cm.. Provenance: - Sir Francis Cook, 1er Baronnet, Vicomte de Monserrate (1817-1901), Doughty House, Richmond, 1875, et par descendance dans la Long Gallery de Sir Francis Cook, 4eme Baronnet (1907-1978), époux de Lady Brenda Cook.- Christie's, 6 juillet 2017, acquis lors de cette vente par le propriétaire actuel © Aguttes/Drouot.
Cette huile sur panneau n'est nullement une découverte, elle est passée récemment sur le marché de l'art où elle fut acquise chez Christie's Londres par un collectionneur vivant en Allemagne. Largement répertoriée, elle appartint à Sir Francis Cook, qui constitua le noyau de sa collection - les écoles italiennes - entre 1860 et 1890. Ce 6 juillet 2017, ce panneau était adjugé 173 000 GBP (frais compris), sur une estimation de 150 000 / 250 000 GBP.
Bernardino Luini (c 1481-1532), Vierge à l'Enfant avec saint Georges et un ange musicien (détail) © Aguttes/Drouot.
Qui était Luini ? Né vers 1480 à Dumenza, il arrive à Milan en 1500 en tant qu’apprenti. L’artiste quitte la ville en 1504 pour y revenir trois ans plus tard, lorsqu’il réalise le maître-autel représentant la Vierge à l’Enfant entourée de Saint Augustin et Sainte Marguerite (musée Jacquemart-André, Paris). Au début de sa carrière, Luini est connu en Lombardie comme un excellent fresquiste. Les commandes qu’il reçoit l’amènent à réaliser des œuvres monumentales, à Milan, à Saronno (commande publique de la ville pour le Santuario della Beata Vergine dei Miracoli), à Lugano (Santa Maria degli Angioli) et dans bien d’autres lieux de la région.
Lorsque Léonard de Vinci travaille à Milan de 1482 à 1499, puis surtout à partir de 1504 jusqu’à son départ pour la France, Luini et son contemporain Giovanni Antonio Boltraffio (1467-1516), sont ses meilleurs élèves et assistants.
Que disait de lui Giorgio Vasari, dans Le vite dei più eccellenti architetti, pittori, et scultori italiani, 1550 ? Un pittore delicatissimo, vago et onesto nelle figure sue” che “valse ancora nel fare ad olio così bene come a fresco, e fu persona molto cortese e servente de l’arte sua; per il che giustamente se li convengono quelle lodi che merita qualunche artefice che, con l’ornamento della cortesia, fa così risplendere l’opere della vita sua come quelle della arte.
L’auteur le caractérise comme un peintre " éminemment délicat, vague et honnête dans ses figures " qui " vaut aussi bien dans la peinture à l’huile qu’en fresque, et il fut une personne très courtoise et au service de son art; c’est pour cela justement que ces louanges lui conviennent et qu’il mérite quelque artifice qui, avec l’ornement de la courtoisie, fasse resplendir l’œuvre de sa vie autant que l’œuvre d’art ".
Bernardino Luini (c 1481-1532), Vierge à l'Enfant avec saint Georges et un ange musicien (détail) © Aguttes/Drouot.
Que représente-t-il ? Le dragon a été tué; à l’arrière plan, son corps acéphale gît à terre, près du cheval blanc. Au premier plan, entrelacement des mains illustre quatre temps : Georges donne la tête du monstre à Jésus; celui-ci la pointe du doigt en signe d’acceptation; il lui remet en échange la palme divine de la victoire; le saint la reçoit.
Trois copies de ce tableau sont connues. L’une, du XVIe siècle, est conservée dans l’église paroissiale de Masnago près de Varese. Une autre, en mains privées, fut vendue en 1988 à Monaco, tandis que la dernière se trouve au musée d’art de Bucarest.
Bernardino Luini (c 1481-1532), Vierge à l'Enfant avec saint Georges et un ange musicien (détail) © Aguttes/Drouot.
Une campagne de restauration récente. Une restauration datant de 1898, réalisée par Signor Cavenaghi à Milan, est mentionnée dans le catalogue Cook. Une autre a certainement eu lieu au XXe siècle, tandis qu’une dernière, très récente, date d’il y a environ 10 ans. Celle-ci avait couvert le tableau de repeints grossiers qui figeaient les visages et d’un vernis jauni qui altérait les coloris d’origine
La campagne de restauration entreprise aujourd’hui a consisté à retirer entièrement la retouche la plus récente, à alléger le vernis et à nettoyer partiellement la seconde couche de restauration. Sous les couches de restauration, la redécouverte la plus importante réside en le visage de Jésus. La texture transparente de la peau, le réalisme de la chair et la douceur du regard ont été mis au jour.
Gilles Kraemer
Vente aux enchères publiques, Drouot, salle 5, jeudi 14 novembre 2019 à 18 h.. Étude Aguttes.
Estimation 1 800 000 / 2 000 000 €.
Exposition mardi 12, mercredi 13 et jeudi 14 novembre 2019.
Au printemps-été 2014, exposition Bernardino Luini e i suoi figli au Palazzo Reale de Milan. www.arte.it/calendario-arte/milano/mostra-bernardino-luini-e-i-suoi-figli-6724
Le Louvre conserve de lui trois fresques, déposées vers 1810 des parois de l'oratoire d'une villa de la famille Litta sise dans un faubourg de Milan nommé Greco Milanese. Et trois peintures : Vierge à l’Enfant avec un ange, dite Madone de Menaggio, le Sommeil de l’Enfant Jésus et Sainte Famille.