Le vivre ensemble de Persona Grata - Musée de l'histoire de l'immigation - MAC VAL
Richard Baquié (1952-1996), Nulle part est un endroit, 1989. Zinc plié et soudé, photographies en noir et blanc sous verres. 200 x 446,5 x 30 cm.. Collection du MAC VAL. Acquis avec la participation du FRAM Île-de-France © photographie Le Curieux des arts, Gilles Kraemer, 15 octobre 2018.
Vue de l'exposition Persona Grata au Musée national de l’histoire de l’immigration - Palais de la Porte Dorée © photographie Le Curieux des arts Gilles Kraemer, visite presse 15 octobre 2018.
Deux lieux. Le MAC VAL à Vitry-sur-Seine dans le Val-de-Marne et le Musée national de l'histoire de l'immigration à Paris, au bord du périphérique, tel un trait d'union entre ces deux lieux. A travers le prisme des œuvres des collections de ces deux institutions, "dans un engagement de connivences" précise Alexia Fabre, Persona grata. L'art contemporain interroge l'hospitalité examine les notions, manifestations et contradictions actuelles construisant ou bousculant les notions d'accueil, d'hospitalité et d'altérité, d'urgence et de départ selon le regard de nombreux artistes qui s'en sont emparés. Hospitalité dans son acceptation la plus large, celui qui accueille, qui est accueilli, le fil conducteur étant la mer vecteur d'espoir au MNHI, l'immigration et l'inhospitalité au MACVAL.
Lahouari Mohammed Bekin (Nîmes 1973), Persona grata, 2016. Néon. Collection du MNHI © photographie Le Curieux des arts, Gilles Kraemer, 15 octobre 2018.
Comme le soulignent Alexia Fabre du MAC VAL et Hélène Orain du Musée national de l'histoire de l'immigration - Palais de la Porte Dorée -, "cette exposition est un cri du cœur, celui d'artistes contemporains face à l'exclusion de l'Autre. C'est une exposition pour agiter les consciences".
![](https://img.over-blog-kiwi.com/0/85/88/28/20181021/ob_4809ce_kimsooja-artaissime-persone-grata-mac.jpg)
Société Réaliste, U.N. Camouflage, 2012. Impression numérique sur polyester, 100 x 150 cm. (chaque drapeau). Collection MAC VAL - Musée d’art contemporain Val-de-Marne. Acquis avec la participation du FRAM Île-de-France. Photo © Marc Domage.
Telle une démonstration forte, la photographie de l'intervention de la coopérative artistique Société Réaliste avec U.N. Camouflage (2012), sur la passerelle Solférino unissant le jardin des Tuileries au quai d'Orsay, qu'elle avait couverte de 139 drapeaux des États membres des Nations Unis convertis en motifs floraux. Ces drapeaux si iconiques, tel un lien entre ces deux institutions, tel un dialogue entre tous les artistes présentés - d'Eduardo Arroyo (décédé le 14 octobre 2018; Jacques Monory décédé le 17 octobre 2018) à Sabine Weiss, de Bertille Bak à Sarkis - sont plantés devant le Palais de la Porte Dorée et flottent au fronton du MAC VAL.
Kimsooja, Bottari-truck - Migrateurs, 2007-2009. Photographie couleur, caisson lumineux. 128 x 182,5 x 25,5 cm. Collection Musée national de l’histoire de l’immigration - Palais de la Porte Dorée © photographie Le Curieux des arts Gilles Kraemer, visite presse 15 octobre 2018.
Second point fort, image elle aussi iconique, nous accueillant dans le Val-de-Marne, la photographie de Kimsooja, Bottari-truck - Migrateurs (2007-2009), représentant une femme assise dans une voiture sur des ballots de différentes couleurs, remontant une des avenues vers la place de la Bastille. L'on aperçoit au fond la colonne de Juillet, surmontée de la statue du Génie de la liberté, rompant ses chaînes. Toute une symbolique dans ces deux images, celui de la traversée des mers ou des montagnes pour trouver la liberté.
Mona Hatoum (1952), Suspendu, 2009-2010. Médium stratifié gravé, chaînes en acier, dimensions variables. Collection du MAC VAL. Acquis avec la participation du FRAM Île-de-France © photographie Le Curieux des arts, Gilles Kraemer, 15 octobre 2018.
Ces institutions - un musée de société qui valorise la création contemporaine et un musée d’art contemporain qui questionne les phénomènes de société - proposent cette double exposition à environ 70 artistes de la scène contemporaine française. Avec les œuvres de Bertille Bak à Sarkis, de Latifa Echakhch à Pierre Huyghe, de Laure Prouvost à Judit Reigl, d'Anri Sala à Chiharu Shiota ou à Barthélémy Toguo au MNHI. Avec celles d'Eduardo Arroyo (décédé le 14 octobre 2018 à l'âge de 81 ans, Jacques Monory étant décédé le 17 octobre à 94 ans, deux artistes de la Figuration Narrative) à Pierre Buraglio ou Mircea Cantor, de Bouchra Khalili ou Clément Cogitore (prix Marcel Duchamp 2018), de Claude Lévêque à Yan Pei-Ming ou Djamel Tatah au MAC VAL.
Clément Cogitore, Parmi nous, 2011. Film transféré en vidéo HD, couleur, son, durée 30'. © photographie Le Curieux des arts, Gilles Kraemer, 15 octobre 2018.
De nombreuses œuvres dévoilent des frontières métaphoriques et dessinent une cartographie, nécessairement partielle, des zones et groupes humains les plus sensibles : hangars de Sangatte, jungle de Calais, enclave de Melilla, archipel des Comores, populations nomades ostracisées, Harragas ou migrants du Maghreb, artistes en exil.
Julien Discrit (1978), What is not visible Is not invisible, 2008. Encre invisible, lumière UV, détecteur de présence © photographie Le Curieux des arts, Gilles Kraemer, 15 octobre 2018. Remerciements à Anne-Sarah Benichou.
Elles évoquent les sources de l’hospitalité, rappellent sa mise en œuvre sur le territoire au cours du XXe siècle, convoquent des images liées à l’impératif du départ, au péril du déplacement, aux formes incarnées du déracinement.
Eva Nielsen (née en 1983 aux Lilas), Zode IV, 2018. Huile, acrylique et sérigraphie sur toile © photographie Le Curieux des arts, Gilles Kraemer, 15 octobre 2018.
Pour Éva Nielsen sa "peinture s'ouvre sur la mer, sur la poésie, sur Apollinaire. Apollinaire avec Le Voyageur, dans une notion d'horizon et de la quête, dans un questionnement de la mer de tous les dangers. Une porte sans aucun verre, une grille inspirée de cette porte métallique vue à Villeneuve-Saint Georges et l'horizon, un horizon retranscrit de l'Écosse".
L’accélération des flux migratoires et le poids grandissant de ces enjeux dans le débat public interrogent les fondements de nos sociétés. D’un côté, camps et murs se multiplient, opérant un renversement irréversible du devoir d’hospitalité, alors que simultanément une mobilisation citoyenne s’amplifie pour accompagner, soutenir et accueillir les migrants.
La question des flux migratoires centrale n’évince pas d’autres formes d’hospitalité négligées aux populations fragilisées, démunies. Autant de propositions sur le vivre ensemble, l’attention à l’autre, raison d’être des hospices, des centres d’accueil.
Autant de vecteurs d’interpellation, de réflexion, de questionnement des certitudes, à travers le regard de l'artiste.
Bertrand Lamarche (Levallois-Perret 1966), Le haut du lièvre, 2012. Maquette. Collection du MAC VAL. Acquis avec la participation du FRAM Île-de-France © photographie Le Curieux des arts, Gilles Kraemer, 15 octobre 2018.
Dans le but d’en débattre ensemble selon les trois commissaires Anne-Laure Flacelière, Ingrid Jurzak & Isabelle Renard.
Gilles Kraemer
première parution de cet article, dans une version plus courte, dans la revue d'art contemporain Artaïssime, n°20, octobre-décembre 2018 www.artais-artcontemporain.org/
Persona grata. L'art contemporain interroge l'hospitalité
MAC VAL - Musée d’art contemporain du Val-de-Marne - 94440 Vitry-sur-Seine
Musée national de l’histoire de l’immigration - Palais de la Porte Dorée - 75012 Paris
16 octobre 2018 - 20 janvier 2019
Commissariat d'Anne-Laure Flacelière & Isabelle Renard pour Paris, d'Ingrid Jurzak pour Vitry-sur- Seine
Le site web commun personagrata.museum fait office de catalogue
www.histoire-immigration.fr
http://www.macval.fr/ http://www.histoire-immigration.fr/
Au MNHI, du 6 octobre au 11 novembre 2018, une programmation pluri-disciplinaire Welcome I.
Au MAC VAL, du 30 novembre au 2 décembre, 8ème édition du festival Attention fragile.
Richard Baquié (1952-1996), Nulle part est un endroit, 1989. Zinc plié et soudé, photographies en noir et blanc sous verres 200 x 446,5 x 30 cm.. Collection du MAC VAL. Acquis avec la participation du FRAM Île-de-France // Matali Crasset (1965), Quand Jim monte à Paris, 1998. Aiguilleté et mousse bi-densité haute résilience, couverture matelas intérieur et extérieur coton © photographie Le Curieux des arts, Gilles Kraemer, 15 octobre 2018, MAC VAL.