Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Publié par Gilles Kraemer

Les Huguenots (saison 2018-2019), acte I © Agathe Poupenay / OnP. 

Comme dans le souvenir de Robert le diable de Giacomo Meyerbeer vu au siècle dernier, en juin 1985, à Garnier, sous la direction de Thomas Fulton. Avec le casting de rêve de June Anderson, Michèle Lagrange, Alain Vanzo, Samuel Ramey et Walter Donati. Dans une mise en scène et des décors de Petrika Ionesco au diapason des ors dorés et argentés du Palais; il ne pouvait pas en être autrement. 10 uniques représentations et plus rien depuis à Paris.

 

Le retour des Huguenots du berlinois Jakob Liebmann Meyer Beer était très attendu, ce vendredi 28 septembre à Bastille; ils furent donnés pour la dernière fois à Paris en 1936. 1119e représentation pour 3 heures 50 de musique sous le regard des membres de l'Arop. Les deux entractes permirent à nombre de spectateurs de partir, peu réceptifs à l'évocation des événements d'août 1572 et du massacre de la Saint-Barthélemy voyant la tuerie des calvinistes parisiens.  

Les Huguenots (saison 2018-2019), acte II,  Lisette Oropesa (Marguerite de Valois) © Agathe Poupenay / OnP.

Défection de Diana Damrau remplacée avec bonheur par Lisette Oropesa. Manifestement, le metteur en scène et la costumière durent visionner mille fois La Reine sanglante tellement Marguerite est Isabelle, Isabelle Adjani dans sa robe rouge puis or dans l'acte de Chenonceau. Et encore plus dans l'acte III, comme sortie du mariage avec Henri de Bourbon à Notre-Dame. La grande captatrice des applaudissements à la fin de cet acte II, mutine, enjôleuse, se jouant des sentiments. Elle interprétera Isabelle dans Robert le diable, à La Monnaie de Bruxelles en avril 2019.

Les Huguenots (saison 2018-2019), acte IV, Ermonela Jaho (Valentine), Yosep Kang (Raoul de Nangis) © Agathe Poupenay / OnP.

Ressentis plus mitigés à l'égard de Valentine d'Ermonela Jaho, notamment dans le duo d'amour avec Raoul qui n'en finit pas, elle ne semble pas trop y croire face à son fiancé - "hanneton sentimental" dans une "niaiserie étourdie" comme le qualifiait George Sand -, Yosep Kang remplaçant Bryan Hymel ayant déclaré forfait. L'on attendait beaucoup de ce ténor, ayant partagé ce rôle au Deutsche Oper de Berlin avec Juan Diego Florez en 2016, dans une direction musicale du même Michele Marlotti de cette production parisienne.

À l'entendre ce vendredi, la voix avait des difficultés de placement et de projection dès l'acte I puis tout au long de cette représentation. Et quelle épreuve dans l'acte IV, après le second entracte, dans le duo d'amour avec Valentine. "Si l'extase où je suis est un songe, / Que jamais je n'arrive au réveil !", il aurait mieux valu un point d'interrogation après ses aigus qui firent sursauter et murmurer quelques mélomanes du parterre. Tout évoquait l'effort.

Les Huguenots (saison 2018-2019), acte V © Agathe Poupenay / OnP.

Belle prestation de Nicolas Testé, Marcel, très homogène et convaincant dans son rôle de serviteur et conseiller d'un Raoul perpétuellement inconstant, lui rappelant sans cesse qu'il est protestant, nous faisant partager largement son exhalation religieuse, sa noblesse de caractère. Belles présences de Paul Gay comte de Saint-Bris et Florian Sempey comte de Nevers.

Pour la mise en scène d'Andreas Kriegenburg, homme du théâtre, n'ayant abordé l'opéra qu'en 2006, il s'est surtout agi d'une mise en place du chœur et des chanteurs réussie dans l'acte I mais totalement brouillonne dans l'acte V et celui du massacre des huguenots. Tout le monde court, se frôle, l'on ne comprend rien à ces mouvements plus chorégraphiques que véridiques dans cet immense décor blanc mouvant, avec ses deux étages, me faisant songer à la gigantesque cage des escaliers mécaniques de l'EMST - musée national d'art contemporain d'Athènes - avec un plafond à la Rudy Ricciotti façon Mucem de Marseille. Que vient faire à la fin Marguerite, robe rouge, cheveux défaits, un bébé dans ses bras ?

Les Huguenots (saison 2018-2019), acte II. Yosep Kang (Raoul de Nangis), Lisette Oropesa (Marguerite de Valois), Paul Gay (Comte de Saint-Bris), Florian Sempey (Comte de Nevers), Ermonela Jaho (Valentine), Karine Deshayes (Urbain), Julie Robard-Gendre (la dame) © Agathe Poupeney (OnP).

Le décor d'Harald B. Thor est beau, intemporel, avec de sublimes lumières d'Andreas Grüter bleutées, rouges ou dessinant une croix. Décor dans l'acte II nous transposant dans les jardins de Chenonceau vus Louvre Abu Dabhi par ses reflets de l'eau sur les murs proches du bleu Tiffany et son dôme à la Jean Nouvel laissant filtrer la lumière. Un peu grand-guignolesque le rideau blanc avec ces coulures rouge sang à la fin de la représentation.

Les Huguenots (saison 2018-2019), acte V, troisième tableau © Agathe Poupenay / OnP. 

© photographie Gilles Kraemer, 28 septembre 2018.

Public à l'écoute. Enfin presque car, comme à son habitude, il applaudit avant la dernière note. Et par deux fois, au cours de cette représentation. Cet irrespect à l'égard de la fosse et du plateau n'est pas de mise au TCE, lieu des mélomanes, les... vrais. Mais pourquoi la direction de Michele Mariotti fut-elle l’objet de quelques huées ? Le public parisien est-il si connaisseur de la musique de Meyerbeer non entendue à l'OnP depuis Robert le diable il y a 33 ans ? 

Belle soirée cependant pour cette résurrection parisienne qu'il faut porter au crédit de Stéphane Lissner.

Gilles Kraemer

orchestre, place achetée

première, vendredi 28 septembre 2018, 18 h

applaudissements nourris pour les chanteurs et la mise en scène

 

 

© photographie Gilles Kraemer, 28 septembre 2018.

Les Huguenots, opéra en cinq actes, 1836

Musique Giacomo Meyerbeer (1791-1864)

Livret Eugène Scribe, Émile Deschamps

Direction musicale Michele Mariotti, Łukasz Borowicz (24 oct.)

Mise en scène Andreas Kriegenburg

Décors Harald B. Thor

Costumes Tanja Hofmann

Lumières Andreas Grüter

Chorégraphie Zenta Haerter

Chef des chœurs José Luis Basso

Orchestre et Chœurs de l’Opéra national de Paris

 

 

 

 

 

 

Marguerite de Valois Fille d’Henri II et de Catherine de Médicis, fiancée au roi Henri de Navarre Lisette Oropesa

Valentine demoiselle d’honneur de Marguerite de Valois, fille du comte de Saint-Bris Ermonela Jaho

Raoul de Nangis gentilhomme protestant Yosep Kang

Urbain page de Marguerite de Valois Karine Deshayes

Marcel ancien soldat huguenot, au service de Raoul Nicolas Testé

Le comte de Saint-Bris, seigneur catholique, père de Valentine Paul Gay

Le comte de Nevers, seigneur catholique Florian Sempey

Tavannes, premier moine Cyrille Dubois

Coryphée, une jeune fille catholique, une bohémienne Élodie Hache

Une dame d’honneur, une jeune fille catholique, une bohémienne Julie Robard - Gendre

Cossé, un étudiant catholique François Rougier Méru

Deuxième moine Michał Partyka

Thoré, maurevert Patrick Bolleire

Retz, troisième moine Tomislav Lavoie

Bois -Rosé, valet Philippe Do

Un archer du guet Olivier Ayault

Quatre seigneurs John Bernard Cyrille Lovighi Bernard Arrieta Fabio Bellenghi

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article