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Publié par Gilles Kraemer

Madame Fouquet © Photographie Julien Jovelin, Avignon, juillet 2018.   Quo non ascendet ? Où ne montera-t-il pas ? Nicolas Fouquet, l'écureuil, pour avoir osé éblouir le Soleil naissant par la somptueuse fête de Vaux du 17 août 1661, jalousé par Colbert, la couleuvre, le paya d'un procès ignominieux. Condamné en décembre 1664 au bannissement et à la confiscation de ses biens. Louis le quatorzième transforma son exil en prison à vie.

" Coupable... seulement de faste... et d'avoir voulu vivre comme un roi " comme il le reconnaît. Dans le temps des mois précédant la mort du Premier ministre Mazarin en mars 1661 à son arrestation par d'Artagnan en septembre 1661, son procès pour lèse-majesté et malversations financières, ce sont ces années du parcours glorieux et de la chute du surintendant des Finances jusqu'à son emprisonnement à Pignerol, que nous restitue Anne de Caumont La Force. Pari gagné, porté par un texte subtil, fin, ciselé, si évocateur et tellement digne du Grand siècle.

L'on se souviendra de la préparation de la fête, de l'énumération du mobilier somptueux de Vaux, des porcelaines du Japon et des laques de Chine, de l'ordonnancement si visuel des mets jusqu'à l'envie de les déguster. Tout était construit pour plaire au roi jusqu'au feu d'artifice clôturant la soirée. " Lui qui courrait après le temps, jusqu'à la fatigue,... qui jouait avec les grands jusqu'à l'épuisement " n'était plus rien au matin du 18 août.

Madame Fouquet © Photographie Julien Jovelin, Avignon, juillet 2018.   Pourquoi osa-t-il circonvenir, Louise, la maîtresse royale, pensant entrer dans les grâces du jeune souverain ? Pourquoi vendit-il sa charge de procureur général au Parlement de Paris qui le rendait justiciable du seul Parlement ? Le sentiment d'être inatteignable, ce que pensent tous les politiques dans leur griserie. " Arrêter le surintendant, je n'ose y croire " voici ce qu'il ne cesse de penser, lui qui pensionne discrètement la reine-mère, " le seul à trouver de l'argent pour le roi " comme il le clame alors qu'il est face au précipice où le jettera la jalousie royale aiguillonnée par Colbert. Il ne voit ni ne comprend rien, ne peut et ne veut entendre sa chute programmée. Un monde nouveau arrive, celui dont Louis a décidé d'être le seul et grand ordonnateur. Il est déjà un homme du passé, face au nouveau monde. Dans son autisme.

Madame Fouquet © Photographie Julien Jovelin, Avignon, juillet 2018.   Face à cet enfermement son épouse, si attentionnée et jalouse des conquêtes de son mari toujours vert et prompt à le démontrer aussi à sa femme, tente désespérément de lui dessiller les yeux. Elle le met en garde, allant jusqu'à le comparer – image tellement drôle - à un artichaut dont l'on jette les feuilles après en avoir mangé le bout. Rien n'y fera. Il est aveugle, croyant jusqu'à son arrestation être l'objet de toutes les sollicitudes de Louis.

Madame Fouquet © Photographie Julien Jovelin, Avignon, juillet 2018.    Portés par une mise en scène subtile, mettant en valeur chaque trait des deux protagonistes, Anne Richard et Daniel Besse se glissent dans leur personnage, donnant vie à ces deux êtres que le malheur réunira et qui ne formeront plus qu'un seul. Jusqu'aux retrouvailles du couple, dans le cachot de Pignerol, lorsque Fouquet tel un enfant se love dans les bras de son épouse. Une image merveilleusement Philippe de Champaigne. Image aussi sublime que celle de la nuque d'Anne Richard si proche de celle de la Jeune fille  à la toilette de Nicolas Reignier.

Gilles Kraemer

séjour et déplacement personnels

Anne de Caumont La Force. Madame Fouquet.

6 - 29 juillet 2018

mise en scène Daniel Besse

Daniel Besse Nicolas Fouquet

Anne Richard Marie-Madeleine Fouquet

Théâtre du roi René - Avignon https://theatreduroirene.com/ 

Dans le cadre du festival off d'Avignon http://www.avignonleoff.com/

#off18    https://twitter.com/avignonleoff

 

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