La vidéo contemporaine se trouve dans un hôtel niçois : Camera Camera
Dans le cadre du festival Monumenta à Nice - 27 octobre-26 novembre - l'association OVNi a souhaité organiser Camera Camera, première édition d'un salon consacré à la vidéo. 20 galeries françaises, auxquelles se joignent deux galeries intrépides de Sėoul Choi & Lager et de New York Michael Petronko qui ont traversé les océans.
La chambre Morellet. Courtesy hôtel Windsor, Nice.
Comme lieu, chacune dispose d'un chambre dans l'hôtel Windsor à Nice, pour présenter un artiste dans un de ces lieux décorés par un artiste, de Mathieu Mercier à François Morellet, de Raymond Hains à Felice Varini. À vous de choisir votre chambre au moment de la réservation lorsque vous descendrez à Nice, ce salon terminé. Comme le souligne Odile Redolfy-Payen, cette aventure de l'investissement dans l'art contemporain fut initiée en 1989 avec Joël Ducorroy.
Sandra Hegedüs, fondatrice de SAM Art Project parraine cette manifestation.
Quelques galeries.
La galeriste Catherine Issert expose les artistes Jennifer Douzenel et Michel Verjux dans la chambre François Morellet. Réalisées dans un temps et un espace donné, les œuvres de Michel Verjux sont constituées de l’élément nécessaire à la perception visuelle : la lumière. Par la projection lumineuse d’une forme géométrique simple, Michel Verjux révèle une situation architecturale ; il élargit la notion d’œuvre d’art à l’espace qui la contient. Jennifer Douzenel réalise des films à partir de plans fixes, silencieux, de courte durée, n'étant jamais mis en scène. Les seules manipulations sur le banc de montage consistent à définir un début et une fin en les signifiant par un fondu. Présentés en boucle, ses films existent dans des formats et selon des moyens de diffusion qui leur sont propres.
La galerie Dix9 d'Hélène Lacharmoise présente Double Noir, œuvre vidéo de Nemanja Nikolic, met en scène un homme poursuivi par son double. Conçu comme une animation, il est composé de séquences de dessins inspirés de 18 films noirs dominés par la figure iconique d'Humphrey Bogart.
Galerie Escougnou-Cetraro présente deux vidéos de Rebecca Digne. Climats (2014) tourné dans son atelier au retour de son voyage au Japon. Au centre de l’espace est disposée une maquette de l’atelier à l’échelle 1/33 dont le sol est couvert de terre noire. Une pluie artificielle inonde la pièce et sature l’image. Dans SEL (2016), le spectateur assiste aux déplacements et à la destruction de blocs de sel par un groupe de personnes, qui les remettent ensuite à la mer. Le sel est une monnaie d’échange, de troc et il est question de communauté, de valeurs, du don.
Clément Cogitore- Les Indes Galantes ( 2017) Courtesy l'artiste et la Galerie Eva Hober.
La Galerie Eva Hober occupe la chambre Jean Le Gac par la présentation de Les Indes Galantes de Cogitore . L'artiste a choisi d’adapter cet opéra-ballet de Jean-Philippe Rameau, plus précisément la Danse des sauvages, inspirée au compositeur par un spectacle de danses d’Indiens de Louisiane. Ici, ce sont des danseurs de Krump, danse née dans le Los Angeles des années 1990 dans un climat de grandes tensions entre ghettos et forces de police. Grimaces, intimidations, la gestuelle fonctionne comme une puissante catharsis et libère dans sa transe les tensions sociopolitiques. À mesure que la musique baroque enveloppe le corps des danseurs, la violence contenue disparaît et la grâce s’affiche, puissante, victorieuse, évidente.
Evangelia Kranioti, Marilyn de Los Puertos (2012) Courtesy l'artiste et la Galerie Vincent Sator.
La galerie Sator défend Evangelia Kranioti, artiste plasticienne née à Athènes (1979), vivant en en France, avec sa vidéo Marilyn de Los puertos. Celle-ci a décidé d’embarquer dans des navires de la marine marchande grecque. En douze traversées et au détour de vingt pays, elle filme la solitude de ces hommes mais aussi les escales, qui leur offrent un moment de tendresse, dans les bras de prostituées. De la Méditerranée à la mer Noire, de l’Atlantique au Pacifique, du pôle Nord au détroit de Magellan, la réalisatrice filme des parcours humains et donne notamment la parole à Sandy, une ancienne prostituée, ou à Yorgos, un ancien capitaine de navire…
Le prix Camera Camera est décerné à la meilleure chambre éphémère et le prix Ben à la meilleure vidéo. Présidée par Sanda Hegedüs (Fondatrice SAM Art Projects), le jury se compose de Ben (artiste), Bernard Chenebault (Président des Amis du Palais de Tokyo), Jean Max Colard (Directeur programmation culturelle Centre Pompidou), Josée et Marc Gensollen (collectionneurs), Safia El Malqui (collectionneuse), Olivier Varenne (co-Directeur des expositions du Museum of Old and New Art, Tasmanie) et de Françoise et Jean-Claude Quemin (collectionneurs).
Pour ce salon Camera Camera, Sandra Hegedüs, a offert une carte blanche à l’artiste Assaf Shoshan - pensionnaire à la Villa Médicis - Académie de France à Rome, 2013 - 2014 - avec Peines Partagées (2014), projet né des rencontres avec des conjointes de détenues, ces femmes qui se disent elles-mêmes “enfermées dehors”, condamnées à une peine qui n’est pas tant de prison que d’attente. Le paradoxe de cette situation a poussé Shoshan à proposer de jouer les intermédiaires d’une façon inédite – en proposant à chaque membre du couple, des deux côtés des murs de la prison romaine de Rebibbia, d’envoyer un message filmé à l’autre. Le photographe se fait ainsi le messager de portraits filmés, muets, destinés aux conjoints, leur offrant l’opportunité de communiquer par ce biais des choses indicibles, enfouies des émotions trop complexes ou douloureuses pour s’exprimer autrement. Toute la richesse de ces sentiments parfois contradictoires, affleure dans ces portraits sans paroles.
Parallèlement à ce salon, l'hôtel Windsor et l’association OVNi présentent une exposition consacrée à la nouvelle série de théâtres optiques de Pierrick Sorin - 27 octobre au 26 novembre -. Sous forme d’hologrammes, réalisés grâce à un savant jeux de reflets, l’artiste apparaît dans des saynètes, qui plongeront les curieux niçois et les résidents de l’hôtel dans un imaginaire burlesque et décalé, où dérision et premier degré sont de mise.
Gilles Kraemer
Camera Camera. Salon d'art contemporain
25 et 26 novembre 2018
Hôtel Windsor - Nice
http://movimenta-camera.ovni.space/
Galeries participantes : Air de Paris (Paris) intervient dans le jardin et le hall, Analix Forever (Genève), Ceysson & Benetière (Paris), Choi & Lager (Seoul), Dix9 (Paris), Double V (Marseille), Espace à Vendre (Nice), Escougnou - Cetraro (Paris), Les Filles du Calvaire (Paris), Porte Avion (Marseille), Claire Gastaud (Clermont-Ferrand), Eva Hober (Paris), Catherine Issert (Saint-Paul de Vence), La Mauvaise Réputation (Bordeaux), Moving Art (Nice), Michael Petronko (New York), Véronique Smagghe (Paris), Vincent Sator (Paris), Sintitulo (Mougins), Snap Projects (Lyon), Un-spaced (Paris), Eva Vautier (Nice).