Fascinante Maria Callas. Le film. Affascinante Maria Callas
Comment ne pas évoquer la fascination à l'égard de Maria Callas qui suscitât, tout au long de sa carrière intérêt, passion, polémique. Quarante ans après sa disparition, elle est toujours aussi présente, restant la référence de générations qui ne la connurent qu'aux travers de ses enregistrements remasterisés pour les rendre aussi parfaits que possible. Ce qu'elle aurait souhaité, elle qui était tellement attachée à La perfection.
Il faut rendre hommage à Tom Volf qui, par cette véritable quête du Graal de quatre années de recherche, nous offre son approche de celle-ci. Depuis le 16 septembre 1977, date de son décès à Paris, de nombreuses biographies parurent, plus ou moins exactes, romancées, ne s'attachant pas forcément à la réalité et surtout à la femme qu'était Maria, devenue La Callas, s'arrêtant plutôt aux faits divers et à la superficialité. Une icône.
Toutes ses recherches lui permirent d'accéder à de nombreux documents, images, photographies, coupures de presse, albums personnels, petits bouts de films super 8, photographies Polaroïd. Des instantanés jamais dévoilés. De s'entretenir avec Bruna, sa femme de chambre pendant 25 ans. Et surtout de visionner des raretés : les films scéniques de l'acte II de Tosca en 1958 à Paris et en 1965 à Londres. L'image que l'on avait d'elle, jusqu'à présent, était celle des saluts aux rideaux et des vues de coulisses, l'arrivée des spectateurs aux premières, les accueils à la descente de l'avion tel un chef d'État, les paparazzi au temps de sa séparation médiatisée avec Giovanni Battista Meneghini, tout un tourbillon de mouvements, des centaines de flashs immortalisant la plus infime de ses apparitions.
Tout ce matériel retrouvé, colorisé, montre sous une forme authentique, personnelle et intime, une Maria gaie, aimant rire, loin des héroïnes tragiques interprétées sur scène. Tom Volf a souhaité de pas établir une nouvelle discographie mais présenter des airs correspondant à des moments forts de sa vie de femme comme Casta diva à Paris ou Habanera.
Dans l'entretien avec David Frost - obtenu auprès de Ferruccio qui fut son majordome pendant 20 ans -, elle évoque sa jeunesse à Manhattan mais édulcore les relations conflictuelles avec sa mère Evangelia Kalogeropoúlou qui s'intéressa à elle lorsqu'elle fut "une voix". Séparée, Evangelia s'installe avec ses deux filles à Athènes en 1937. C'est ici qu'apparaît son mentor Elvira de Hildalgo, soprano colorature, son professeur qui lui enseigna l'art oublié du bel canto, lui permettant d'aborder tous les rôles, aussi bien dramatique que colorature; dans ce film, il n'est pas fait allusion de ses débuts dans les rôles wagnériens (Brünnhilde, Kundry et Isolde). Très liée avec son professeur durant toute sa vie, elles resteront en contact épistolaire. Fanny Ardant, de sa voix rauque et inimitable, lit dans ce film plusieurs passages de ses lettres dans lesquelles elle livre ses joies mais surtout ses doutes, ses peines au moment de sa rupture avec Aristote Onassis et de sa séparation avec Meneghini.
Si sa carrière débuta à 16 ans à Athènes, Tom Volf ne présente celle-ci qu'à partir de ses succès à la Scala en 1950. Scala, anagramme à une lettre de son vrai nom de famille Kalogeropoúlou raccourci par son père lors de l'émigration de la famille à New York.
Elle sut imposer, au prix de n'être pas comprise de suite, sa manière de chanter et surtout d'interpréter, de jouer et de bouger sur scène comme une véritable tragédienne, magnifiée par les mises en scène de Luchino Visconti - Traviata - et de Franco Zeffirelli - Tosca -.
Coup de tonnerre dans le ciel nocturne romain le 2 janvier 1958. Elle ne peut chanter le second acte de La Norma, représentation annulée devant le président de la République. Broncha. Le président en fait une affaire personnelle. Elle n'imaginait pas continuer à trahir Bellini en interprétant l'acte II d'une façon inégale. Imaginerait-on aujourd'hui semblable médiatisation ? Impossible sauf... pour un joueur de football. Et encore... . Paris la consacrera une nouvelle fois diva en 1958 à Garnier, où elle interpréta en air d'entrée Casta diva, le triomphe, à l'occasion du gala de la Légion d'honneur, devant un certain Onassis qui n'eut d'yeux que pour elle et dont les amours durèrent jusqu'en 1968. Sa carrière laissait place maintenant à des concerts en Europe, en Asie et aux États-Unis, à l'incursion cinématographique de Médée sous la direction de Pier Paolo Pasolini. De son répertoire, elle ne gardait plus que Norma et Tosca. Dernière représentation scénique en juin 1965 à Covent Garden pour Tosca. Devant la reine, ses adieux à la scène.
À 41 ans l'âme se consume avoue-t-elle. La musique la seule langue que je possède. Maria avait compris qu'elle ne serait plus la voix capable de trois octaves jusqu'au contre mi naturel, de la sombre Lady Macbeth aux plus légères, aériennes et lumineuses héroïnes de Bellini et de Donizetti. Le film se termine par La mamma morta d'Andrea Chénier d'Umberto Giordano. Et le rideau se ferme définitivement sur O mio babbino caro, extrait de Gianni Schicci de Puccini, qu'elle donnait toujours en bis de ses concerts.
Une image idéalisée, une hagiographie ! Est-ce vraiment elle ? Quarante ans après elle interpelle toujours. Vissi d'arte, vissi d'amore, des mots tellement prononcés par la fascinante Maria Callas.
Antoine Prodhomme
Maria by Callas
Un film de Tom Volf.
Avec la voix de Fanny Ardant.
Durée : 1h 53
Sortie le 13 décembre 2017.
Exposition Maria by Callas. Du 16 septembre au 14 décembre 2017.
La Seine Musicale. Île Seguin, Boulogne-Billancourt. Commissariat de Tom Volf.
Photographe et réalisateur, Tom Volf a longtemps eu en charge la communication digitale et audiovisuelle du Théâtre du Châtelet. Il publie Callas confidential. 240 pages. Octobre 2017. Éditions de La Martinière. 45, 5 euros.