Un monde en poésie avec Mark Tobey, Philip Guston, Jan Fabre & David LaChapelle. Expositions de la 57ème Biennale de l'Art de Venise. Un mondo in poesia tra gli eventi della 57e Esposizione Internationale d'Arte - La Biennale di Venezia (III)
Gilles Kraemer & Antoine Prodhomme
déplacement et séjour à titre personnel à Venise
Casa dei Tre Oci. Témoignage de l'architecture vénitienne du début du XXe siècle qui fut la maison-atelier de l'artiste Mario De Maria. Elle n'échappe à personne avec ses trois fenêtres du piano nobile, enfin pour ceux qui quittent les sestieri de San Marco ou du Dorsoduro, pour la Giudecca. Une vue extraordinaire sur le bacino di San Marco, LA plus belle sur la Sérénissime sauf lorsque l'un de ces énormes navires de croisière empruntant le canal de la Giudecca brouille le paysage de sa masse. http://www.lecurieuxdesarts.fr/2015/12/sombre-venise-sous-les-grands-navires-photographies-par-gianni-berengo-gardin-l-exposition-interdite.html.
Kitsch ? Vraiment réducteur ce qualificatif si souvent accolé à David LaChapelle (Connecticut 1963) comme il l'est pour Pierre & Gilles. Ce photographe perturbateur est l'observateur que trop lucide de ses contemporains, même si ces photographies ne conviennent pas à tous et peuvent choquer. Démonstration magistrale Casa dei Tre Oci, en une centaine de photographies, des années 1990, lorsque Andy Warhol lui propose d'être photographe pour la revue Interview, à aujourd'hui. Cette rétrospective à Venise propose la présentation, en avant-première, de sa dernière série New World - dont il dit que les Odilon Redon du musée d'Orsay, William Blake, naturellement Michelangelo l'inspirèrent - bercée de beauté et de mysticisme, réalisée dans la même continuité thématique que celle de Paradise.
"Amo creare tramite l'uso della fantasia, tramutando in immagine i miei sogni". "J'aime créer par l'intermédiaire de l'imagination, traduisant en images mes rêves". Initiant le début de cette exposition New World, par son retour à la pureté de l'humain et le désir de spiritualité, résonne dans cette longue promenade proposée par les commissaires Reiner Opuku et Denis Curt, avec les précédentes séries The Deluge si Michel-Angelesque, After the Deluge et Awakened, Showtime at the Apocalypse, Seismic Shift mettant à mal les iconiques Damien Hirst et Jeff Koons si présents dans une fondation du Grand Canal à Venise, Good news for modern man, Land Scape et Gas Station sur les installations pétrolifères et les stations d'essence, Still life (Last supper), The Beatification, les avions dans les cieux d'Aristocracy, Heaven to Hell.
Les thèmes de LaChapelle oscillent entre le plaire à tout prix, le superflu, la starisation à l'extrême, la femme devenant le panneau publicitaire ambulant d'une maison de mode, la superficialité, la nudité agressive, le monde-paillettes des célébrités, l'icône de la chanson, la ré-interprétation de la peinture de la Renaissance, la provocation. Avec un grand coup de pied dans tous ces excès de notre civilisation du paraître.
A retenir, dans une salle à part, au rez-de-chaussée, la série Earth Laughs in Flowers, un monde différent de celui auquel il nous a habitué. La représentation de la Nature morte, Stile Life, Vie tranquille, avec des immenses bouquets de fleurs dans lesquels chaque fleur est porteuse de symbole. Mais, à y regarder de plus près, dans cette évocation, si peinture flamande ou Grand Siècle, que de renvois vers la décadence et la mort, dans ces incorporations aux pieds de ces Vanités florales d'un téléphone portable, d'une canette de bière, d'un avion en plastique, d'aliments... .
Affiche de l'exposition Philip Guston and the poets avec The Line, 1978. Huile sur toile, 180,3 x 186,1 cm.. Collection privée © Le Curieux des arts Antoine Prodhomme, semaine presse, 8 mai 2017, 57ème Exposition Internationale d'Art - La Biennale di Venezia.
Les Gallerie dell'Accademia, merveilleux volumes au sein de l'Accademia. Un lieu magique d'exposition né de l'alchimie entre un endroit porteur d'histoire et le respect de son architecture par Tosetto, le scénographe de cette exposition Philip Guston and the poets (Montréal, Canada 1913-1980 Woodstock, New York).
L'artiste américain y dialogue avec cinq poètes à travers 72 peintures et dessins. Cinquante années de carrière dans une réflexion avec D.H. Lawrence, W.B. Yeats, Wallace Stevens, Eugenio Montale et T.S Eliot avec ses "énigmatiques images" comme l'un des cartels dénomme son œuvre présenté à Venise. Retour dans la Sérénissime puisqu'il participa à la 30ème Biennale d'Arte 1960, exposant dans le Pavillon des États-Unis. Hommage aussi aux relations entretenues avec l'Italie, où il vint pour la première fois en 1948, pays lui parlant au cœur, à travers un intérêt très précoce pour le Quattrocento et le Cinquecento, les fresques de Masaccio à Santa Maria delle Carmine à Florence, Luca Signorelli, Paolo Uccello, le cycle de Storie della Vera Croce de Piero della Francesca à la Basilica di San Francesco à Arezzo, Pontormo et Parmigianino, Tintoretto et Tiepolo, de Chirico. Toutes ses influences italiennes transparaissent dans les premières salles face à Cosmè Tura, Vittore Carpaccio et Giovanni Bellini. Puis, cette image très prégnante dans son œuvre, celle du pied, le pied de marbre du dieu Sérapis vu à Rome. Le parcours se prolonge avec les dialogues avec les cinq poètes, son épouse la poétesse Musa McKim. Commissariat de Kosme de Barañano pour une exposition incontournable dans le parcours du biennaliste. Ne pas oublier aussi Giorgione, Bosch, Tiziano et Tintoretto à l'Accademia..
Vue de l'exposition Pietas Jan Fabre à Scuola Nuova della Misericordia, commissariat de Giacinto di Pietrantonio, Katerina Koskina, du 2 juin au 16 octobre 2011 © Le Curieux des arts Antoine Prodhomme, semaine presse, 31 mai 2011, 54ème Exposition Internationale d'Art - La Biennale di Venezia.
Déjà... . De lointaines rémanences de la 54e Biennale, en 2011, à la Scuola Nuova della Misericordia, sous le commissariat de Giacinto di Pietrantonio et Katerina Koskina (directrice de l'EMST, ΕΜΣΤ (Εθνικο Μουσειο Συγχρονησ Τεχνησ)), Pietas Jan Fabre. Dans cette ancienne institution, dévolue à la charité dans son assistanat aux pauvres, étaient disposées sur une estrade dorée, en monstration, cinq sculptures : une Pietà très michelangelesque mais à tête de mort soutenant Jan Fabre, des cervelles avec des clous formant une croix, des arbres, une croix ou des tortues sur le dos; sur les colonnes des formes ovales recouvertes d'élytres de coléoptères.
Retour de Jan Fabre à Venise, dans ce lieu de l'abbazia di San Gregorio, à quelques mètres de la basilique de la Salute, avec Glass and Bones Sculptures 1977-2017. Commissariat des mêmes avec la venue de Dimitri Ozerkov. Une quarantaine de sculptures de verre et d'os (humains ou d'animaux) de Jan Fabre (Anvers 1958). Des œuvres mêlant fragilité et dureté, teintées parfois d'encre bleue Bic. L'exposition aurait pu aussi se dénommer Glass, Bones and Blue Bic Ink comme le souligne Giancinto di Pietrantonio, directeur de la Galleria d'Arte Moderna e Contemporanea di Bergame.
"Les raisons philosophique et poétique qui m’ont amené à associer le verre et les os humains et d’animaux ensemble me viennent d’un de mes souvenirs voyant ma jeune sœur tout juste née jouant avec un petit objet de verre; j’ai alors pensé à la souplesse de la structure de l’os humain et à la malléabilité avec laquelle le verre est produit. Certains animaux et tous les êtres humains, sortent du ventre de leur mère comme le verre fondu sort du four. Ils peuvent tous deux être modelés, déformés, façonnés avec une incroyable liberté". Jan Fabre, janvier 2017.
Que voir dans les salles et le cloître de cette abbatiale ? Revisitez bien votre Jheronimus Bosch, les marges fourmillantes de vie des Livres d'Heures, le polyptyque de L'Agneau mystique. Des clefs d'un Jardin des délices face aux squelettes de chiens sous une pluie de serpentins colorés, la Croix de feuilles aux couleurs si proches des carapaces des coléoptères sur laquelle glisse le Serpent - juxtaposition du péché et de la rédemption -, des couloirs de Vanités de têtes de mort bleues avec des squelettes de pic-vert ou d'écureuil ou d'autres petits animaux, un barque - celle du passage -, un immense scarabée vert d'où jaillit un arbre (l'Arbre de vie ?), des planètes entourées de spermatozoïdes, une robe en os. La vie, la mort et l'Après, si prégnant dans l'œuvre de Jan Fabre.
Il n'y a pas que Jackson Pollock ou son frère Charles qui ont toute leur place à la Peggy Guggenheim. Mark Tobey (Centerville, Wisconsin 1890 – Basilea 1976) y règne, en maître, pour cette exposition, la première en Italie. De lui, Georges Mathieu - bien oublié en France - lui écrivait que son influence sur les peintres de New York était évidente et le critique anglais Patrick Heron reconnaissait dans son commentaire relatif à la XXIX Biennale, 1958, qu'il était le précurseur de Pollock lorsqu'il y reçut le Lion d'or de peinture.
Qui était ce peintre converti à la religion monothéiste, née en Iran au XIXe siècle, la religion bahá'ie prônant le bien-être de l'humanité et la contribution à la solidarité mondiale ? Il s'initiera à la calligraphie auprès du chinois Ten Gui et résidera au Moyen-Orient où il travaille l'écriture peinte.
Réponse en 66 numéros, d'une gouache sur papier Near Eastern Landscape, 1927 à Coming and going, 1970, tempera et pastel sur carton et Moving Moments, 1970, huile sur toile. Commissariat de Debra Bricker Balken.
Philip Guston and the poets
un des 23 événements collatéraux de la 57e Exposition Internationale d'Art - La Biennale di Venezia
10 mai - 3 septembre 2017
Gallerie dell'Accademia - Dorsoduro, 1050 (Campo della Carità) - Venezia
Vaporetto fermata Accademia. Linea 1 ou 2
Commissariat Kosme de Baraňano
Nessuno servizio di stampa per il catalogo ! Pas de catalogue remis en service de presse !
David LaChapelle : Lot + Found
12 avril - 10 septembre 2017
Casa dei Tre Oci - Fondamenta delle Zitelle 43 - isola della Giudecca - 30133 Giudecca, Venezia
Vaporetto, fermata Zitelle. Linea 4.1 ou 2 depuis Ferrovia. Linea 2 ou 4.2 depuis San Zaccharia
www.treoci.org #treoci #lachapellevenezia #lachapelletreoci
Commissariat Reiner Opoku et Denis Curti
Catalogue important en italien et anglais. La couverture reproduit un détail de The First Supper (2017) de la série New World. Textes de Reiner Opoku David LaChapelle. Lost + Fund; de Denis Curti L'età iconica e la fotografia. L'ouvrage s'ouvre par les 11 photographies de New World. 256 pages. 115 illustrations. Très belle typographie en noir et vert pour cet ouvrage de lecture agréable édité par l'excellentissime maison vénitienne Marsilio Editori, faut-il le souligner. Prix 45 euros.
Jan Fabre. Glass and Bone Sculptures. 1977-2017
un des 23 événements collatéraux de la 57e Exposition Internationale d'Art - La Biennale di Venezia
13 mai - 26 novembre 2017
Abbazia di San Gregorio - Dorsoduro 172 - Venezia
Vaporetto fermata Salute. Linea 1
Commissariat Giacinto di Pietrantonio, Katerina Koskina, Dimitri Ozerkov
Catalogue en italien ou en anglais. Textes de Dimitri Ozerkov, Melania Rossi, Giacinto Di Pietrantonio, Dimitri Ozerkov, Adriano Berengo. 128 pages. Son intérêt réside dans les photographies in-situ de l'exposition conférant à cet ouvrage, un plus. Maison d'éditions florentine Forma Edizioni. Prix 45 euros.
Mark Tobey. Luce filante // Mark Tobey: Threading Light
6 mai - 12 septembre 2017
Collezione Peggy Guggenheim, Venezia
Vaporetto fermata Accademia ou Salute. Linea 1
Film de l'exposition www.guggenheim-venice.it/exhibitions/tobey/index.html
Commissariat Debra Bricker Balken
Elle sera présentée Addison Gallery of American Art, Phillips Academy, Andover, Massachusetts du 4 novembre 2017 au 11 mars 2018
Catalogue indispensable et incontournable, en italien ou en anglais. Texte de Debra Bricker Balken. 208 pages. Skira Rizzoli publications. Prix 48 euros.
Prochaine exposition à Peggy Guggenheim, Venezia. Picasso. Sulla spiaggia. Commissariat de Luca Massimo Barbero. Du 26 août 2017 au 7 janvier 2018 www.lecurieuxdesarts.fr/2017/12/picasso-et-ses-baigneuses-a-venise-picasso-sulla-spiaggia-a-venezia-peggy-guggenheim-collection.html.