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Villa Médicis, Rome © photographie Le Curieux des arts Antoine Prodhomme, 15 novembre 2014

André Gattolin, sénateur des Hauts-de-Seine, vice-président de la commission des finances, membre du groupe écologiste, a mené durant le premier semestre 2016 une mission de contrôle budgétaire sur l’Académie de France à Rome, plus connue sous le nom de Villa Médicis (établissement public administratif sous tutelle du ministère de la Culture et de la Communication). Il a présenté les conclusions de ses travaux, en particulier la gestion budgétaire de la Villa et les bourses des pensionnaires, à la presse, ce jeudi 6 octobre 2016.

Les pensionnaires de la Villa firent parler d'eux ! Lorsqu'une photographie représenta, à l'automne 2015, six d'entre eux assis sur la statue de la déesse Rome des jardins médicéens alors que neuf de leurs collègues et la directrice de la Villa Muriel Mayette étaient au pied de cette statue. Pareil événement se serait-il déroulé sous le mandat de Balthus, du comte Balthazar Klossowski de Rola ? Ce geste scandalisa la presse italienne à la vue de cette image largement diffusée et commentée outre-Alpes. Le peu de considération pour l'histoire de ce lieu magique de l'Urbs à laquelle les romains sont si sensibles et attachés, choqua. Fut-il pris suffisamment en considération côté français ? Ceci permettait à Art Tribune du 2 décembre 2015 de titrer "Borsisti-hooligans all’Accademia di Francia di Villa Medici ? Ancora polemiche a Roma sulla nuova direttrice Muriel Mayette-Holtz". Des boursiers-hooligans, encore des polémiques avec la nouvelle directrice Muriel Mayette-Holtz. artribune.com/2015/12/borsisti-hooligans-allaccademia-di-francia-di-villa-medici-ancora-polemiche-a-roma-sulla-nuova-direttrice-mauriel-

Rappelez-vous que la venue de Balthus comme directeur de l'Académie de France à Rome, voulue par André Malraux, ministre de la Culture, ministre d'Etat qui ne laissait pas à d'autres ou au Premier le soin de décider à sa place d'une nomination, souleva une "bronca". Celle de l'académie des Beaux-Arts pour laquelle le poste de directeur était réservé à l'un de ses immortels. Replongez-vous dans le texte qu'Annick Lemoine écrivit dans le catalogue de l'exposition Balthus au palazzo Grassi (septembre 2001-janvier 2002), commissariat de Jean Clair. Le peintre succédait, en février 1961, pour une période de 6 années, au compositeur Jacques Ibert, ancien prix de Rome en 1919, qui fut directeur de l'Académie de France à Rome de .... 1936 à 1961. Le contrat du comte Balthazar Klossowski de Rola fut renouvelé et "il régna seize ans sur la Villa et ses pensionnaires". La place aurait dû revenir au paysagiste André Brayer (1907-1990), ancien grand prix de Rome lui aussi. "Le jugement de la presse fut unanime : cette désignation était perçue comme un signe de renouvellement et révélait une volonté manifeste de transformer l'institution".   

L'histoire se répète. Il est vrai que la nomination, en septembre 2015, par Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication, de Muriel Mayette : "Artiste, comédienne et metteure en scène, Muriel Mayette a été l’administratrice générale de la Comédie Française de 2006 à 2014. Son savoir-faire, tout comme son expérience acquise à la tête de cette grande institution, seront un atout important pour conduire le développement de la Villa Médicis " souleva de nombreuses réactions. Et une tribune parue dans Libération le 2 septembre 2015 : Mauvais casting à la Villa MédicisAlors que Muriel Mayette, ex-patronne de la Comédie Française, vient d'être nommée à la tête de la Villa Médicis, des artistes et des chercheurs estiment que l'actuel directeur, Eric de Chassey, devrait rester en poste. Ils publient dans «Libération» une lettre ouverte à la ministre de la Culture et de la Communication.next.liberation.fr/arts/2015/09/02/mauvais-casting-a-la-villa-medicis_1374503

Villa Médicis, Rome © photographie Le Curieux des arts Antoine Prodhomme, 15 novembre 2014

Finies ces polémiques. La Villa est un lieu magnifique, sur les hauteurs de la colline du Pincio, dans un parc de 7 hectares. Son budget annuel 8 millions d'€ se répartit entre une subvention pour charges de service public allouée par l’État de 4,79 millions d’euros en 2016, à laquelle s'ajoutent une dotation en fonds propres du ministère de la Culture de 1,28 millions d'€ et 2 millions d'€ de la billetterie des expositions, de la location des espaces, de l'hôtellerie et d'un mécénat principalement d'entreprises ... italiennes, que tint à souligner André Gattolin lors de la présentation de son rapport. Une comparaison entre le budget annuel de la Villa et celui que le palais Farnèse attribue à son service culturel aurait été intéressante, point non indiqué dans le rapport.

Dans son avant propos, le sénateur "formule dix-huit recommandations articulées en quatre axes. L’ensemble de ces recommandations vise à garantir un accueil de qualité aux pensionnaires tout en poursuivant la rationalisation de l’organisation de la Villa et l’enrichissement de sa coopération avec les « maisons sœurs » que sont les autres Villas, les autres institutions culturelles françaises à Rome et le projet de Clichy-Montfermeil."

Les recommandations visent à la définition d’un statut des pensionnaires dont celui-ci est actuellement assimilé à la position de fonctionnaire en détachement. Dans l'adaptation à la création artistique de plus en plus collective - binômes ou des collectifs d’artistes- il serait souhaitable  que chacun des membres reçoive une bourse. Pour renforcer la lisibilité et l’équité des bourses, cesser de calculer les bourses par référence au droit de la fonction publique : ne plus déterminer l’indemnité par référence à un indice de la fonction publique, ce qui supprime de facto les avantages familiaux que sont le supplément familial et les majorations familiales. Aujourd'hui, la bourse est d'un montant de 3 300 euros net mensuel, pour un célibataire et s'élève à 4 500 euros pour un couple, hors montant de l'hébergement précédemment défalqué. Le montant moyen de la bourse par pensionnaire a fortement augmenté, passant d’environ 56 000 euros par an en 2005 à près de 73 000 euros en 2014. Cette hausse de plus de 30 % en neuf ans découle du changement de profil des pensionnaires : outre le fait qu’ils sont plus nombreux, ils sont également plus âgés et donc ont davantage tendance à bénéficier du supplément familial.

Des formes d'expression actuelles nécessitent des moyens différents -entre un écrivain, un compositeur musical ou un photographe- et nécessiteraient de dégager à moyens constants une enveloppe budgétaire dédiée au financement des moyens techniques dont peuvent avoir besoin les artistes.

Dans l'instauration d'échanges fructueux des pensionnaires entre eux les recommandations souhaitent l’organisation d’ateliers de travail réunissant une partie ou la totalité de la promotion sur des thématiques définies par les pensionnaires dans les premières semaines de leur séjour, la réaffirmation de l’obligation de francophonie des pensionnaires et, plus largement, des résidents dans le partage d’une langue commune qui ne saurait être, dans une institution française financée par les deniers publics, autre que le français. Pour un renforcement des liens entre les pensionnaires et l’Italie, le développement d'un programme spécifique d’accueil en résidence d’artistes italiens est à envisager.

Retour en arrière, après la suppression du prix de Rome en 1968 remplacée par la sélection sur dossier ? La 9ème recommandation souhaite la recréation d'un prix de Rome pouvant être attribué, sur décision d’un jury international d’artistes et de critiques d’art, à un ou plusieurs pensionnaires ou anciens pensionnaires artistes dans le cas où les travaux menés durant le séjour ont abouti à la création d’une œuvre originale. Reste à définir l'originalité d'une œuvre ! Si une définition existe !

Parmi les personnes entendues, aucun anciens pensionnaires ! Seulement trois pensionnaires de la promotion 2015-2016.

Gilles Kraemer

La Chambre turque, Villa Médicis, Rome © photographie Le Curieux des arts Antoine Prodhomme, 23 octobre 2015, visite presse de l'exposition Balthus, Villa Médicis, Rome

 

Tag(s) : #Patrimoine, #Entretien à 210 km-h, #Italie, #Rome
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