L'Abbaye Royale de Fontevraud, une Citée idéale, une Thélème des arts
Claude Lévêque, Mort en été, 2012. Installation in situ dans le Grand dortoir, Abbaye Royale de Fontevraud. Barques de Loire noires, barres lumineuses rouges suspendues, lampes rouges, filtres rouges 4 750 x 510 x 1 210 cm. Diffusion sonore : ondulation de tintements cristallins. Conception sonore en collaboration avec Gerome Nox © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, présentation presse, avril 2015.
Découvrez l'abbaye de Fontevraud, aux confins de l'Anjou, de la Touraine et du Poitou, la cité monastique fondée en 1101 par Robert d'Arbrissel, nécropole des Plantagenêt -gisants d'Aliénor d'Aquitaine, Henri II et Richard Cœur de Lion-, dirigée à partir du XVIe siècle par des abbesses issues de la famille royale des Bourbon, maison centrale de 1804 jusqu'en 1963, lieu évoqué dans Miracle de la rose par Jean Genet bien qu'il n'y fut pas incarcéré.
Aujourd'hui, lieu de création. Centre culturel de rencontre. En 1984, deux années après la création du Fonds Régional d'Art Contemporain des Pays de la Loire qui occupa ces lieux et fut dirigé par Jean de Loisy, s'y ouvrent des ateliers de musique et d'art plastique. Jean-Michel Alberola, Richard Baquié, Ange Leccia ou Philippe Cogné y résidèrent. En 2006, des résidences d'artistes en cinéma d'animation y sont créées.
En 2012, Claude Lévêque conçoit pour le Grand dortoir Mort en été, une œuvre qui embarque le spectateur sur la Loire, dans une gabare, la barque institutionnelle de ce fleuve. Il imagine un voyage méditatif et onirique, un songe flottant, avec une musique tintillante composée par Gerome Nox. Cette œuvre, plongée dans le rouge de ses néons, lorsque vous la découvrez seul, me renvoie vers une autre vision, totalement différente, celle de Nantes au temps de la Révolution française.
Autre œuvre pérenne : Un clin d'œil à Saint Benoît de François Morellet, comme un geste simple, elliptique, l'éclair de Dieu qui illumine saint Benoît dans sa grotte un soir d'orage. L'artiste a exécuté dans la chapelle Saint-Benoît ce trait lumineux d'un grand arc de cercle fragmenté de néons rouges, se déclenchant une fraction de seconde lorsque l'on se trouve en ce lieu de silence. Immense discrétion de « cette intégration architecturale la plus radicale que je n'ai jamais réalisée... » comme le précise François Morellet.
Claude Lévêque, Mort en été, 2012, installation in situ dans le Grand dortoir de l'Abbaye Royale de Fontevraud // Vues extérieures de l'Abbaye © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, présentation presse, avril 2015
Comme le souligne Emmanuel Morin, chargé de projets en arts visuels à l'Abbaye royale de Fontevraud, cette institution s'est unie à la Maison Ackerman pour la création de La Résidence Ackerman + Fontevraud La Scène. Cette maison saumuroise ouvre l'espace de ses caves troglodytiques pendant trois années à un artiste et apporte sa contribution financière (budget de production et honoraires de l'artiste). L'Abbaye, par sa structure Fontevraud La Scène, offre la logistique et l'assistance de sa résidence d'artistes à l'artiste invité à imaginer une œuvre originale dans ces caves.
Vingt-quatre candidats postulèrent la première année. Le jury, nommé pour trois ans, se compose de Mathias Courtet, directeur de l'École d'arts plastiques de Mayenne et coordonnateur de la Chapelle des Calvairiennes de Mayenne, Marc Lenot, rédacteur du site Internet Lunettes Rouges et Christophe Theilmann, architecte. Ce dernier est le maître d'œuvre de l'extension de bureaux Cité des Machines dans l'Atelier des Machines sur l'île de Nantes.
Julien Salaud est le premier artiste lauréat - année 201 5- de La Résidence Ackerman + Fontevraud La Scène. Son œuvre, Fleuve céleste est visible, d'avril 2015 au printemps 2018 dans les caves d'Ackerman à Saint-Hilaire Saint-Florent. La clôture du second appel d'offre est le 30 septembre 2015.
Découvrez aussi, au sein de l'Abbaye, son restaurant ordonné autour du cloître et se prolongeant dans la salle capitulaire (cuisine précise et minimaliste, comme les jardins sec et humide du temple Ryõan-ji à Kyoto, de Thibaut Ruggeri, servie dans des céramiques imaginées par Charles Hair) et son hôtel de 54 chambres, installés dans le prieuré Saint-Lazare, l'ancienne infirmerie de la période carcérale de l'abbaye. Une parenthèse chaleureuse incitant à la contemplation, imaginée par les designers Patrick Jouin et Sanjit Manku. Leur intervention, comme l'effleurement silencieux d'une plume d'ange, a laissé parler l'âme et l'histoire des murs monastiques.
Et, vous pourrez même y boire Fontevreau, l'eau issue de la source de ce village du Val de Loire, tirant son nom de la Fontaine d'Evraud alimentant la communauté monastique depuis le XIIe siècle.
Gilles Kraemer
Fontevraud ou la découverte de l'émotion [est] dans l'inattendu comme il est écrit sur le site http://www.fontevraud.fr
Fleuve céleste de Julien Salaud, visible à la Maison Ackerman http://www.lecurieuxdesarts.fr/2015/04/la-terra-incognita-du-fleuve-celeste-de-julien-salaud.html
La cuisine de Thibaut Ruggeri. Légumes de saison ; Sandre beurre blanc ; Poulette de Racan ; Crème brûlée © Le Curieux des arts Gilles Kraemer, présentation presse, avril 2015