Nicolas de Staël & Amedeo Modigliani, le match des géants chez Sotheby's Paris
Attention, match des géants chez Sotheby's Paris, deux chefs d'œuvre présentés à la galerie Charpentier.
D'un côté Portrait de Paul Alexandre d'Amedeo Modigliani (1884-1920), œuvre inédite sur le marché et conservée par les héritiers de Paul Alexandre, de l'autre Composition de Nicolas de Staël (1914-1955) conservée jusqu'à présent dans la famille de son acquéreur.
Des pièces jamais passées sur le marché, 1912 pour l'une, 1950 pour la seconde !
Nicolas de Staël, Composition, signé, huile sur toile, 204 x 404,5 cm, exécuté en 1950. Provenance collection Denys Sutton, Londres. Transmis par descendance au propriétaire actuel. © Photographies Gilles Kraemer, présentation Sotheby's Paris, 26 mai 2014.
Dans une magnifique mise en scène, face à nous en entrant, un coup de poing visuel, cet immense tableau se détachant sur sa cimaise blanche : Composition de Nicolas de Staël. Spectaculaire. Asseyez vous devant, rêvez, plongez dans cet océan de couleurs, laissez vous engloutir et submerger. C'est impressionnant de grandeur et de présence, cette toile spectaculaire par ses dimensions (200 x 400 cm), ce premier grand format qu'il peignit. Cinq années plus tard, cet ange de lumière tirera sa révérence à Antibes.
Merveilleux tableau acheté par Denys Sutton à l'automne 1950, le critique d'art anglais qui rencontra le peintre à la fin des années 1940, le convaincra de venir à Londres durant l'été 1950. Choc avec la ville qu'il laissera transparaître dans une lettre à son épouse Françoise « Westminster l'abbaye, une masse énorme de grisaille où éclate un gazon vert sans précédent... Tamise, gris noir... ». De Staël exposera en Angleterre en février 1952, à la Matthiesen Gallery, 26 tableaux.
Comment peut-on se séparer d'une telle œuvre, de cette toile dans laquelle l'on voit tout, dans laquelle l'on ne voit rien ? Ce tout et ce rien fait de touches si vibrantes. Où tout n'est que ressenti et silence. Un chef d'œuvre construit de multitudes de gris, de blanc et de noir, de bleu ardoise et de bleu gris. Avec quelques égratignures de rouge, le sang du peintre, le sang de ce poète capteur de lumière. Un paysage tendant vers l'abstraction mais si architecturé dans ces couleurs qui se disputent l'espace.
Présentée au Centre Georges Pompidou, lors de la rétrospective Nicolas de Staël en 2003, cette toile est estimée 2, 5 – 3 ,5 millions d'euros. Cette pièce de qualité muséale fut vendue 4 241 500 euros avec commission acheteur.
Amedeo Modigliani, Portrait de Paul Alexandre, signé Modigliani (en bas, à droite), huile sur toile. 92 x 60 cm., peint en 1911-1912. Provenance docteur Paul Alexandre, Paris (acquis de l'artiste). Par descendance au propriétaire actuel // Paul Alexandre vu de trois quarts, la main gauche dans la poche, porte le tampon DE P.A. et le numéro 4. 04 (en bas à droite), crayon gras sur papier, 27 x 19,7 cm, exécuté en 1909 © Photographies Gilles Kraemer, présentation Sotheby's Paris, 26 mai 2014.
Amedeo Modigliani, le Portrait de Paul Alexandre peint en 1911-1912, celui qui fut le premier et le principal mécène de l'artiste, de 1907 à 1914.
Resté dans la famille de Paul Alexandre, sa dernière apparition remonte à 2002, à Paris, au musée du Luxembourg, dans cette exposition si accrocheuse, où les tableaux jouaient au touche à touche, une accumulation dans laquelle ressortaient, triomphants, quelques tableaux dont celui-ci. Le voici, aujourd'hui, quittant cette famille dans laquelle il était depuis plus d'un siècle, ce magistral et émouvant tableau du médecin et amateur d'art et dont Modigliani réalisa quatre autres portraits. Peint juste après le décès de sa mère, Paul est plongé dans une mélancolie. Palette sombre, blanc du col et des poignets, costume noir, un ascétisme à la Greco. Regard triste, ces yeux qui me font penser à ceux de Pontormo, avec cette grande orbite de l'oeil et cet immense iris. Ne ratez pas l'exposition Pontormo e Rosso Fiorentino. Divergentie vie della « Maniera » au palais Strozzi à Florence, jusqu'au 20 juillet, magistrale présentation comme toutes celles de cette fondation italienne.
A côté, un dessin de Modigliani, Paul Alexandre vu de trois quarts, la main gauche dans la poche, en une pose si aristocratique. Provenance ? La même que celle de la toile.
Estimation de ce dessin de 1909 : entre 200 000 et 300 000 euros. Adjugé 505 500 euros avec commission acheteur
Le Portrait de Roger Dutilleux, fut vendu par Sotheby's Paris, en décembre 2013 pour 6 481 500 euros. Alors, combien pour Paul Alexandre, estimé 5 000 000 – 8 000 000 euros ? Largement dépassé avec 13 537 000 euros commission acheteur incluse, prix record pour cet artiste en France.
Exposition Art impressionnisme & moderne, Art contemporain © Photographies Gilles Kraemer, présentation Sotheby's Paris, 26 mai 2014.
Autres œuvres que vous pouvez apercevoir sur ces images défilantes.
Meun de Simon Hantaï (estimation 100 000 – 150 000 euros et vendu 385 500 euros), 1er oct. 2006 de Pierre Soulages (361 500 euros sur estimation de 150 000 – 200 000 euros), Gekidou suru aka de Kazuo Shiraga (1 000 000 – 1 500 000 euros, propulsé à 3 905 500 euros) ;
Don Quichotte de Germaine Richier (1 665 500 euros avec une estimation 500 000 – 600 000 euros), 18.9.65 de Zao Wou-Ki (350 000 – 450 000 euros et vendu 733 500 euros) ;
Le Peintre et son modèle & L'Atelier de Picasso (3 009 500 euros pour 2 200 000 – 2 800 000 euros & 697 500 pour 500 000 – 700 000 euros) ;
Paysage impressionné d'Alechinsky (200 000 – 300 000 euros, vendu 241 500 euros), La Mante – Grande de Germaine Richier (445 500 euros pour 250 000 – 300 000 euros), Paysage de Provence (Grigan) de de Staël (205 500 euros sur une estimation de 150 000 – 200 000 euros), 27 février 1990 de Pierre Soulages (433 500 euros sur estimation de 250 00 – 350 000 euros) ;
Ides of March de Cy Twombly (2 673 500 euros 2 000 000 – 3 000 000 euros) placé judicieusement à côté et dans un saisissant dialogue avec Grand torse d'Adam d'Émile Antoine Bourdelle (judicieux achat à 61 500 euros pour une estimation de 30 000 – 40 000 euros) et Personnage, oiseau de Miró (1 000 000 – 1 500 000 euros).
Et aussi, la Statue Fanf-Mabea, bois, métal et verre, Cameroun, ancienne collection Félix Fénéon puis Jacques Kerchache. Elle sera vendue chez Sotheby's Paris, le 18 juin 2014, sur une estimantion de 2 500 000 - 3 500 000 euros, vente d'Arts d'Afrique et d'Océanie. Vous la voyez, de profil, devant les deux Pablo Picasso, normal pour le père des... Demoiselles.
Finalement, ce 18 juin 2014, lors de la vente des Arts d’Afrique et d’Océanie chez Sotheby’s à Paris, la Fang Mabea, a dépassé à 4. 353.500 euros son estimation haute. Ce chef-d’œuvre de la statuaire africaine a illustré la couverture de la « Bible » dans ce domaine, L’art africain (Kerchache, Paudrat, Stéphan). Cette statue spectaculaire (67 cm), aux surfaces parfaitement polies du bois dense de teinte blonde, le raffinement de la sculpture qui oscille entre réalisme des détails et idéalisation de la silhouette, tout ceci constitue l’apothéose du style.
Sotheby's Paris
76, rue du Faubourg Saint-Honoré – 75008 Paris
Art contemporain vente 3 juin 2014 à 19 h & vente 4 juin à 14h 30
Exposition du mardi 27 mai au mardi 3 juin
Art impressionniste & moderne, vente le 4 juin 2014 à 18h 30
Exposition du mardi 27 mai au mardi 3 juin
Attention jeudi 29 mai, c'est la fête de l'Ascencion, la galerie Charpentier est fermée
Internet : sothebys.com
Dans le cadre du centenaire de la naissance de Nicolas de Staël, deux expositions lui rendent hommage :
Nicolas de Staël. Lumières du Nord – Lumières du Sud, du 7 juin au 9 novembre 2014, musée d'art moderne André Malraux, Le Havre.
Staël, la figure du nu, 1951 – 1955, du 17 mai au 7 septembre 2014, musée Picasso, Antibes